Sur les chemins noirs – Sylvain Tesson

C’est du film dont j’ai d’abord entendu parlé, et ensuite du livre dont il est adapté, qui raconte cette traversée de la France, du Mercantour à la pointe du Cotentin, en suivant le plus possible de vieux chemins, évitant bien sûr le goudron, mais aussi les sentiers de randonnée (dans la mesure du possible).

Je ne suis pas fan de l’auteur, même si son accident (chute d’un toit) semble l’avoir transformé (et pas que physiquement), lui le toiturophile. C’est en tout cas ce qu’il laisse entendre dans ce récit, et la décision de se lancer ce défi en lieu et place de rééducation montre la force de caractère du bonhomme. L’alcool, cause de sa chute, lui est désormais interdit, ça change aussi la donne !

C’est bien écrit, Sylvain Tesson est cultivé et le paysage lui inspire de nombreuses réflexions qu’il agrémente parfois de références culturelles, sans en faire trop heureusement. C’est d’ailleurs plus un ouvrage littéraire que le récit plus factuel de cette traversée de la France du Sud-Est jusqu’au Cotentin. Il donnera peu de détail sur son évolution physique, mais vu d’où il part, dès sa sortie de l’hôpital, le bougre a l’air d’être résistant à la douleur. Il est bon marcheur, puisqu’il parle parfois de 40 kms par jour (après plusieurs semaines de marche tout de même !).

Par contre, très peu infos sur le contenu du sac, ce qu’il mange, comment il s’est organisé… On sait juste qu’il emporte une dizaine de cartes IGN avec lui (de quoi aller jusqu’au Mont Ventoux), cartes qu’il va scruter pour s’y frayer un chemin hors des sentiers battus (l’expression n’a jamais aussi bien convenue). J’aurais bien aimé qu’il nous en dise plus sur ces détails pratiques.

Il est parfois accompagné quelques jours par un ami, sa fille également le rejoint pour une journée et une nuit. Il dort souvent dehors, à l’abri d’un arbre, fait un feu et dîne… Mais peut aussi bien se retrouver à l’hôtel ou plus rarement chez l’habitant. Peu de rencontres, et encore moins de dialogues, quelques mots et voilà… Sur les chemins noirs, on est économe de tout !

À passer des jours à éviter « la civilisation », il raconte tout ce qu’elle a généré comme changement : le remembrement, la productivité imposée aux agriculteurs qui durent quitter la montagne pour la plaine, etc… Honnêtement, rien de très nouveau sur le sujet (mais des vérités certes), et pas certain qu’il soit le mieux placé pour en parler. Mais au final, une réflexion tout de même intéressante sur le monde moderne, ce qu’il a transformé dans nos campagnes à coups de promesses non tenues…

Voilà, je ne dirai pas que c’est un grand livre, loin s’en faut (mais il se laisse lire sans problème), on reste dans les pensées de Sylvain Tesson, et ça reste très personnel. On sent tout de même le type de réflexion et le recul qu’amènent la marche, menée dans une solitude recherchée et appréciée, avec une volonté de rester hors des grands axes et loin des villes. Et c’est sans doute le meilleur du livre.

Sylvain Tesson, né en 1972, est un écrivain voyageur. Il est par certains qualifié d’imposteur en tant qu’écrivain voyageur reproduisant des clichés éculés de la littérature de voyage. Le personnage est de toute façon assez clivant et provocateur, amoureux de l’espirt slave et de la Russie. Il a repris dans L’Axe du loup l’itinéraire de À marche forcée (cette histoire d’évadés du Goulag qui traverse l’Asie du Nord au Sud jusqu’à Calcutta…), afin d’en vérifier la faisabilité : pour lui, l’aventure est plausible, malgré quelques anomalies absolues, comme « dix jours sans boire dans le Gobi ».

L’Ange sur le toit – Russel Banks

Toujours dans l’idée de lire ou relire Banks, je suis tombé sur ce petit recueil de nouvelles chez le libraire. Eh bien, ce fut un vrai plaisir que de lire ces dix nouvelles (parfois c’est compliqué : soit on n’accroche pas à l’histoire, soit on est frustré de sa fin rapide).

Ce ne fût pas le cas ici, toutes les histoires se tiennent sur le même thème, celui des rapports humains, que ce soit ceux entre mari et femme, père et fille, fils et mère âgée, patron et employée, et même notre rapport au monde. Et d’un moment-clé, à priori anodin, où soudain plus rien ne sera comme avant.

Franchement, c’est bien, c’est simple, et le mieux est parfois l’ennemi du bien. Quelles sont nos réelles motivations ? Le passé est-il vraiment ce que l’on se rappelle ou ce que l’on a bien voulu nous dire ? Notre confiance en nous-même ne tient elle pas à peu de chose ? Tout peut basculer si vite…

Et avec Russel Banks, on a l’assurance d’une belle écriture. Un très bon recueil de nouvelles donc.

Autres romans de Russel Banks sur ce blog :

Russel Banks (1940-2023) est un écrivain « progressiste » américain (dixit wikipedia). Il a été actif politiquement, prenant par exemple position contre l’intervention en Irak, ou le Patriot Act. Il a été le troisième président du Parlement international des écrivains créé par Salman Rushdie, et le président fondateur de Cities of Refuge North America, qui s’est donné pour mission d’établir aux États-Unis des lieux d’asile pour des écrivains menacés ou en exil.

Les miracles du bazar Namiya – Keigo Higashino

Livre choisi un peu au hasard à la librairie de Concarneau, envie de retrouver un univers japonais sans doute, après avoir gardé un très bon souvenir de Âme brisée.

Le bazar Namiya est fermé depuis longtemps, mais par un curieux et inexpliqué phénomène, il va revivre une nuit, quand trois petits voyous vont s’y réfugier. L’ancien propriétaire avait pris l’habitude de répondre aux lettres que des inconnus déposaient dans sa boite aux lettres, lui demandant conseil face à un problème dans leur vie.

Durant cette nuit, le temps va se contracter et faire revivre certaines demandes d’il y a quarante ans, auxquelles les trois jeunes vont tenter de répondre. Le prétexte à raconter quelques tranches de vie qui s’entremêlent les une aux autres, de façon tout aussi étrange que cette contraction du temps. L’occasion aussi de montrer qu’un conseil de bonne foi peut être mal avisé, et finalement sera interprété par celui qui le reçoit pour correspondre à ce qu’il pense au fond de lui, peut-être inconsciemment.

La lecture est agréable (sans atteindre les sommets), on s’emmêle un peu entre les personnages, les époques et les destins croisés, mais si l’on fait abstraction de cette contraction du temps, c’est plaisant à lire, et le tout dans la culture et la société japonaise de ces 40 dernière s années.

Keigo Higashino, né en 1958, est un écrivain japonnais, auteur réputé de romans policiers bien ciselés. Il est reconnu en 1985 avec son roman « Après l’école » (non traduit), ce qui lui permet d’arrêt son travail d’ingénieur chez DENSO, et de se consacrer à l’écriture. En 2010, il reçoit le « Prix polar du meilleur roman international » à Colmar pour « La maison où je suis mort autrefois ». Auteur prolifique semble-t-il, plusieurs de ses écrits ont été adaptés à l’écran (ici).

Comprendre sa douleur – Earl Thompson

Troisième volume de l’histoire en partie autobiographique d’Earl Thompson, publié à titre posthume, après Un jardin de sable puis Tatoo.

Cette fois le personnage s’appelle Jarl Carlson, il est devenu adulte, et essaie de s’en sortir avec toujours autant de difficultés, incapable de trouver sa voie et sa place. Son enfance où il a du apprendre la vie à la dure tout seul, puis ses années d’armée et de guerres l’ont endurci sans l’épanouir.

Il suit des cours à l’université grâce à son allocation éducative de GI, et travaille dans un HP pour compléter son salaire. Il plaît aux femmes, participe à l’édition d’une revue universitaire, mais est profondément insatisfait :

Et donc, se disait-il, voilà à quoi j’en suis réduit : un grincheux, un aigri, qui vit dans une putain de YMCA, se tire sur la nouille en se demandant si sa bite rétrécit, s’il est assez masculin, s’il est barjot ou non de bosser pour une misère, et qui se sent coupable comme c’est pas permis parce que, même comme ça, il est certain d’être destiné à bien mieux que ses pairs, que ses ancêtres, que l’autre connard qui se paluche dans la chambre minable d’à côté.

Tout semble s’arranger lorsqu’il rencontre une jeune doctoresse divorcée et que le coup de foudre est réciproque. Mais il enverra tout balader sur un coup de tête, ou plutôt sur un malaise récurrent qui le hante :

Je suis une espèce de salopard congénital. Je le sais, et j’essaie de travailler là-dessus (…) Mais je passe mon temps à me rappeler d’où je viens, où je suis passé, ce que j’ai fait, et j’ai l’impression d’être un nègre blanc qui trompe une société qui ne soupçonne rien.
Il y a une phrase dans l’autobiographie de Woody Guthrie, En Route vers la gloire, qui dit à peu près: « Où que je sois, j’ai toujours l’impression que je devrais être ailleurs. »> C’est exactement ce que ressentait Carlson. Le pourquoi de cet état de fait, en revanche, était un mystère.

Il finira par se lancer dans l’écriture, persuadé d’être un grand écrivain. Le premier essai se révélera mauvais, et l’enverra toucher le fond. Ce n’est qu’à ce moment qu’il écrira vraiment quelque chose d’excellent, même s’il s’écoulera encore beaucoup de temps et de travail avant qu’il ne soit publié.

Contrairement aux deux premiers tomes, où l’on éprouve de l’empathie pour le jeune personnage malgré ses « dérives », ici c’est d’un homme adulte qu’il s’agit, qui se révèle parfois vraiment détestable et très égoïste. Mais c’est aussi un personnage étonnant, refusant de se plier à ce que la société « bien pensante » voudrait, intelligent, qui cerne bien les personnes qu’il rencontre, avec toujours ce rapport étrange au sexe, ainsi qu’avec les femmes : il aime, mais n’éprouve aucune jalousie, ni aucun besoin de fidélité, semblant confondre sexe et amour. Attention, les scènes de sexe sont assez nombreuses et plutôt crues.

Earl Thompson (1931-1978) est un écrivain américain. Les trois romans mentionnés ici sont largement autobiographiques, et celui-ci publié à titre posthume (titre original « The Devil to Pay »). Libération a relevé une ressemblance dans les romans sur sa jeunesse, avec « Mort à crédit » de Céline. Earl Thompson a aussi publié un autre roman (« Caldo Largo ») de son vivant, mais non traduit en français à ce jour. Il meurt d’une rupture d’anévrisme à l’apogée de son succès, à l’âge de 47 ans.

Le livre d’Ebenezer Le Page – Gerald Basil Edwards

J’aime cette collection « Les grands animaux » de la maison d’édition « Monsieur Toussaint Louverture ». Aussi quand la libraire de Concarneau m’a conseillé ce roman, je l’ai pris.

C’est l’histoire d’une vie, la sienne, que nous raconte Ebenezer Le Page, alors qu’il est âgé de 80 ans et sent que la fin approche. C’est un pur habitant de Guernesey, l’île anglo-normande qu’il n’a jamais quitté. Il a vu passer la 1ere guerre mondiale, y a échappé tout en voyant des amis partir pour défendre l’Angleterre, et certains ne pas revenir… La seconde guerre mondiale verra les allemands occuper son île chérie qui va ensuite se transformer avec le tourisme à l’époque moderne. Les noms de lieux et de rues sont en français, héritage du duché de Normandie, et les habitants parlent un patois où le vieux français se fait sentir.

Ebenezer a du caractère, c’est le moins que l’on puisse dire, a mené une vie solitaire, athée au milieu de cathos, anglicans et méthodistes ; il assume son indépendance, sans prétendre être ni intelligent ni parfait, et est souvent assez réactionnaire, dans le sens où « c’était mieux avant ». Les cancans de l’île sont racontés avec force détails, histoires de familles, de mariages, de fâcheries, de générations… Y compris son histoire d’un amour qui n’aboutira pas avec la belle Liza Quéripel, ou la mort de son ami d’enfance Jim qu’il n’oubliera jamais (il oublie peu de choses il est vrai), ou encore la difficulté à vivre de son cousin Raymond, travaillé par des amours interdites… À travers tout cela, c’est la vie de l’île qu’il nous raconte, avec son franc-parler, ses jugements sans appel, sa franchise aussi, et son humour jamais très loin.

La fin est particulièrement émouvante, quand Ebenezer se met en quête de trouver un héritier, lui qui n’a plus de famille hormis des cousins au troisième ou quatrième degré. Il va les voir pour les jauger, sans qu’aucun ne trouve grâce à ses yeux. Mais il finira par trouver la bonne personne, et cette rencontre finale est vraiment très belle.

Gerald Basil Edwards (1899-1976), né à Guernesey, est un auteur britannique dont cet ouvrage est le seul livre. Il l’écrit à la fin de sa vie, alors qu’il vit en ermite, sans réussir à le faire publier. C’est un ami qui y parviendra quelques années après sa mort, et le livre connaîtra le succès.

La génération de l’utopie – Pepetela

Livre recommandé par François Busnel dans la petite librairie, avec cette histoire relatant la désillusion de jeunes Angolais après la révolution et l’indépendance acquise dont le titre m’a tout de suite interpelé. Et je n’ai pas été déçu, c’est passionnant de bout en bout.

Sara, Aníbal, Malongo, Vítor et Elias sont étudiants angolais à Lisbonne, quand les premiers mouvements de libération armés apparaissent en Angola (1961). Le milieu étudiant est en ébullition à la Maison des Étudiants de l’Empire, sous l’œil du PIDE, la police politique du gouvernement Salazar.

Sara, étudiante en médecine, sort avec Malongo, joueur de foot semi-pro, plus intéressé par la fête et les filles que par la politique. Sara est très lucide et clairvoyante (sauf en amour) mais est tenue un peu à l’écart en tant que femme de ce qui se trame dans les coulisses de la Maison des Étudiants. Anibal, qui après une licence d’histoire et de philosophie, effectue son service militaire obligatoire, va devoir fuir rapidement pour éviter de partir se battre contre son pays natal. Vitor lui, échoue à ses examens et étudie peu, s’intéresse à la politique mais sans vraiment s’impliquer, et souffre du racisme montant à Lisbonne. Quant à Elias, qui ne fait pas vraiment partie du groupe, il vit dans un foyer protestant en dehors de Lisbonne ; c’est un intellectuel, politisé, et justifiant la violence nécessaire à la révolution.

Le roman se divise en quatre parties qui englobent une période de 30 ans, du début de la lutte armée (1961), jusqu’aux accords de paix après la guerre civile entre différents groupes révolutionnaires comme le MPLA et l’UNITA (1991), en passant par l’indépendance après la chute du gouvernement Salazar et la révolution des œillets (1975). Nos cinq personnages, avec chacun son parcours, se retrouveront tous à Luanda, la capitale de l’Angola, à la fin de l’histoire.

Roman passionnant, retraçant l’itinéraire de ces jeunes pleins d’espoir pour leur pays natal, et qui verront peu à peu leurs belles idées d’indépendance, de justice et d’égalité se fracasser face à la réalité. Cinq destins très différents, et une fresque pour laquelle on se passionne, car si elle est historique elle sait rester au niveau des individus qui la composent.

Pepetela, de son vrai nom Artur Pestana, est né en 1941 à Benguela et est un écrivain angolais. Après des études au Portugal il s’exile à Paris et à Alger. En 1960 il s’engage dans la guerre d’indépendance avec le MPLA et en 1975 il est nommé Vice-Ministre de l’Éducation. Professeur de sociologie et écrivain, il a publié une quinzaine de livres. En 1997, le Prix Camões, le plus important prix littéraire de la langue portugaise, lui a été décerné pour l’ensemble de son œuvre.

OMV : Mise à jour des containers Nextcloud et Plex

Voilà un moment que je cherchais comment mettre à jour proprement mon instance Docker de Nextcloud. En fait l’info était bien disponible, bien que peu détaillée, sur la page du container, mais je me mélangeais un peu les pinceaux entre l’image, le container, et l’application elle-même.

Voilà ce qui est indiqué dans la documentation fournie par Linuxserver.io, ce n’est pas hyper clair, et la section « Updating Info » pour chaque container n’est vraiment ni détaillée ni très explicite :

La plupart de nos images sont statiques, versionnées, et nécessitent une mise à jour de l’image et une recréation du conteneur pour mettre à jour l’application qu’elles contiennent. À quelques exceptions près (par exemple, nextcloud, plex), nous ne recommandons ni ne prenons en charge la mise à jour des applications à l’intérieur du conteneur.

Sur les forums Docker, on déconseille également l’utilisation de Portainer, l’interface fournie par défaut dans OpenMediaVault pour gérer ses images et containers Docker. En particulier pour des problèmes de gestion de version des applications justement.

Donc pour la création d’un nouveau container, rien ne vaut une bonne vieille commande docker run, et tant qu’à faire autant la mettre dans un script pour pouvoir la réutiliser facilement. Pour Plex, cela suffira à utiliser la dernière version de l’application au sein de se nouveau container. Pour Nextcloud, on procédera de la même manière pour récupérer les images, on utilisera Portainer pour créer la stack, puis il faudra mettre à jour l’application elle-même à l’intérieur du container, étape supplémentaire et nécessaire. Dans les deux cas, on ne perd rien de sa configuration ou de ses fichiers, et tout est relancé en quelques minutes.

Enfin, je parlerai vite fait de la mise à jour d’OMV lui-même à la fin de l’article.

Allons-y…

Continuer la lecture… OMV : Mise à jour des containers Nextcloud et Plex

Yellow birds – Kevin Powers

C’est un article du Monde où l’on demandait à des auteurs de recommander un livre et un seul : à cet exercice, Brigitte Giraud (prix Goncourt 2022) recommandait ce livre.

C’est un tout petit roman, le récit à la première personne d’un soldat américain parti combattre en Irak. Récit en partie autobiographique puisque l’auteur est effectivement un vétéran de la guerre d’Irak.

L’écriture est assez littéraire, presque poétique par moments, et l’auteur arrive à nous embarquer dans le quotidien de Bartle, 21 ans, revenu d’Irak, sans pour autant être dans une description factuelle. Il s’agit plutôt de l’évocation de ce qui s’est passé là-bas, en combattant à Al Tafar, mais aussi des raisons de l’engagement, et surtout du retour très difficile à vivre : car Murphy, 18 ans, son jeune compagnon de combat n’est pas rentré au pays comme Bartle en avait fait la promesse.

C’est très bien écrit et construit, et les images que l’auteur transmet permettent de rendre compte de la violence et de l’absurdité des combats, mais surtout de ce qui se passe dans les têtes de ces jeunes américains plongés sans grande préparation dans ce maelstrom. Le retour sera tout aussi difficile à vivre pour Bartle, et l’on comprend bien ce que peuvent éprouver les vétérans en manque total de repères et de raisons de vivre dans un monde redevenu sans violence et aux valeurs qui apparaissent tellement vaines. Ne serait-ce que pour cela, cette lecture vaut vraiment le coup.

Kevin Powers est né en 1980 en Virginie. Il s’est engagé à 17 ans et est parti combattre en Irak de 2004 à 2005. Il a ensuite étudié la littérature (sans doute grâce aux bourses accordées aux vétérans), et a obtenu un diplôme de poésie. Yellow Birds est son premier roman, en partie autobiographique. Il a été porté à l’écran en 2017 par Alexandre Moore.

Trilogie 93 – Olivier Norek

Sur les recommandations de ma frangine, je retente une lecture de Norek avec son œuvre « phare » : trois romans policiers qui se passent dans le « neuf trois », là où Norek exerçait son métier de policier avant de prendre la plume.

Les trois romans se composent de « Code 93 », « Territoires » et « Surtensions ». On y suit les enquêtes du capitaine Coste, flic humaniste qui arrive peu à peu au bout de sa capacité à digérer la violence qui l’entoure.

C’est pas mal, mais honnêtement, je ne suis décidément pas un grand fan de l’auteur. Le personnage de Coste est plutôt sympa, son équipe aussi, mais on a bien du mal à accrocher aux amourettes que tente désespérément de créer l’auteur pour ses personnages ; sorti de l’enquête proprement dite, le reste a bien du mal à exister. L’accumulation de chapitres très courts n’arrange rien à l’affaire, et les limites de l’écrivain à vraiment passer à la littérature s’affichent. Restent les enquêtes.

Code 93 ne m’a pas du tout emballé, la police n’ayant pratiquement rien a enquêter, puisque qu’un journaliste et le coupable se chargent pratiquement de tout, ce dernier allant même jusqu’à se donner la mort. Mais que fait la police ? 😉

Territoire est par contre une vraie réussite, que ce soit au niveau de l’intrigue simple et efficace, comme de l’implication sociale et politique que le trafic de drogue implique dans ces quartiers.

Surtensions est pas mal non plus, mais l’intrigue est cette fois beaucoup moins évidente, la première partie servant plus de prétexte qu’autre chose (et résolue en trois coups de cuillère à pot), et n’apportant rien à la deuxième enquête à part servir à l’épilogue… Bref, un peu capillotracté et pas au niveau du précédent.

Bon, voilà, après Impact, roman plus récent, et qui m’avait déjà largement déçu (le succès aidant, on produit au lieu de créer), je pense avoir fait le tour de cet auteur. En le lisant, je pensais aux grands auteurs américains de romans noirs décrits par Manchette dans ses chroniques, en me disant qu’on était quand même à des lieux de la qualité de ces romans. À sa décharge, différents lieux, différentes époques peuvent expliquer certaines différences, mais pas toutes.

Olivier Norek, né en 1975 à Toulouse, est un écrivain et scénariste français, capitaine à la police judiciaire, en disponibilité depuis son premier succès littéraire (trop pratique). En tant que scénariste, i la participé à la saison 6 d’Engrenages, à la série télévisée « Les Invisibles » (France 2- 2021) ainsi qu’à un téléfilm « Tout le monde ment » avec Vincent Elbaz (France 2 – 2022).

Sous le règne de Bone – Russel Banks

Troisième relecture de Banks avec ce roman qui m’avait bien plu à l’époque, genre livre de chevet de tout adolescent en crise existentielle… mais pas réservé pour autant à cette génération. Un roman d’apprentissage comme le précise Wikipedia.

C’est le récit du voyage initiatique d’un jeune ado de 14 ans complètement paumé, qui préfère fumer des pétards que d’aller à l’école, amené à quitter le domicile familial où son beau-père le harcèle, et qui commence à ne pas imaginer vivre autrement que de trafics en tout genre… Bref, Chappie, avec sa crête d’Iroquois, est largement sur la mauvaise pente, et son avenir plutôt sombre. Il se fait tatouer deux os croisés sur le bras, et prend le nom de Bone.

La vie va lui faire croiser un espèce de clochard rasta, I-Man, qui lui transmettra sa philosophie de vie, et sera le premier à lui inculquer des valeurs positives. Petit à petit, à chaque expérience (il y en aura, et pas toujours sympas !), on voit Bone commencer à réfléchir par lui-même, nous faire partager ses réflexions pouvant apparaître comme naïves mais qui vont lui faire découvrir les frontières entre le bien et le mal et se construire sa propre morale… I-Man l’emmènera en Jamaïque, où Bone finira par croiser son vrai père qui n’est hélas pas un modèle, et achèvera de lui forger le caractère et de le préparer à sa future vie.

Très belle histoire, car Bone est attachant, et le voir évoluer au fil de ses aventures, jusqu’à se construire en ayant réussi à garder ses valeurs est très positif.

Marrant, la référence à la fin au bateau « Belinda Blue » du capitaine Ave à la fin de l’histoire sur lequel s’embarque Bone : c’est le bateau qui apparaît dans « Continents à la dérive » ou Ave est Avery, le copain de Bob Dubois ! Alors que Bone est écrit en 1995, et « Continents… » en 1987 : un petit clin d’œil de l’auteur ! 😉

Encore un bon moment de passé à relire Russel Banks, je vais continuer à lire ou relire cet auteur, c’est encore mieux que je ne m’en souvenais.

Autres romans de Russel Banks sur ce blog :

Russel Banks (1940-2023) est un écrivain « progressiste » américain (dixit wikipedia). Ce livre contient des descriptions explicites d’utilisation de drogue et d’abus sexuel, qui en raison de l’âge du narrateur, ont contribué à susciter une polémique lors de la publication aux États-Unis.

Lectures, Ubuntu, Smartphone, Cinéma, entre autres…