À marche forcée – Slavomir Rawicz

Avec ce livre j’attaque un carton que m’a laissé ma sœur Dominique partie faire le tour du monde en bateau ! Elle a préparé une petite sélection de titres susceptibles de me plaire, et je lui garde son carton jusqu’à son retour…

Une très bonne idée, la sélection a l’air pas mal, et mon budget bouquin va s’en trouver allégé d’autant, ce qui n’est pas plus mal !

Celui-là, je pense l’avoir lu, mais il y a très longtemps… En tout cas je connaissais l’histoire. Par contre, j’étais persuadé que c’était une histoire vraie, mais la page Wikipédia de l’auteur nous apprend le contraire : Rawicz se serait inspiré du récit d’un de ses compatriotes, Glinski, et encore là non plus rien n’est certain.

Le journaliste de Radio BBC, Hugh Levinson, qui a examiné The Long Walk (le titre original) sous toutes les coutures, déclare en 2010 :

Se peut-il que Glinski soit le véritable héros de l’histoire et que Rawicz lui ait piqué son histoire ? C’est possible, mais nous n’avons trouvé aucun élément permettant de corroborer le récit haut en couleurs de l’évasion et du périple de Glinski.

Cela remet beaucoup de choses en question quand on le lit : roman ou histoire vraie ?… Mais la lecture n’en reste pas moins agréable, même si le style n’a rien d’exceptionnel, et que finalement l’essentiel du récit se résume à marcher, marcher et encore marcher.

Restant à l’écart des habitations pendant ces 6 000 kms, en constante sous-alimentation, traversant le désert de Gobie, les efforts fournis paraissent en effet sidérants. La résistance humaine est réellement incroyable quand poussée dans ses retranchements, avec des hommes jeunes pour la porter (encore que « Mr Smith » soit plus âgé).

On se demande pourquoi ils ne s’arrêtent pas plus tôt, une fois sortis d’U.R.S.S ? Mais la Mongolie est un pays communiste, et le premier pays « ami » des alliés est finalement l’Inde ; cette destination devient alors une sorte d’obsession, leur terre promise… Ils vont donc continuer de marcher, et à éviter les endroits habités. Ils éviteront même Lassa…

Un des faits marquants de l’aventure est l’hospitalité et la noblesse des mongols qu’ils vont croiser au fil des chemins. Elle se répétera plusieurs fois, et après le traditionnel « J’espère que vos pieds vous portent bien dans votre voyage » (quand ils peuvent se comprendre), ils partageront ce qu’ils ont pour leur offrir le thé, de simples pistaches, ou un repas…

Tout le monde n’arrivera pas à destination, et le récit devient poignant à ces moments là. Ils ne seront que quatre à rallier Calcutta et à s’y faire soigner (ils sont partis à sept, et seront huit quand ils croiseront la route de Kristina, la jeune polonaise). Le trajet aura duré deux ans ! L’auteur restera pour sa part en traitement pendant plus d’un mois à l’hôpital, arrivé dans un état vraiment critique (la nuit, il essaie de s’évader pour reprendre la marche !).

Un passage est assez surprenant, celui où le narrateur décrit ce qu’il dit être sans doute « l’Abominable Homme des Neiges » : ils observent des créatures énormes (hauteur estimée 2m40) marchant sur leurs pattes arrières, qui manifestement ne les craignent pas… Ils ne s’en approchent pas et finiront pas les contourner. L’auteur est persuadé que ce jour là, ils ont probablement croisés ces êtres dont parlent les indigènes et pour lesquels des expéditions scientifiques ont été organisées…

J’en ai ensuite profité pour regarder le film qui en a été fait : « Les chemins de la liberté » de Peter Weir (2010). Énorme déception, il s’agit d’une adaptation très libre de l’histoire, et tout a été changé on se demande bien pourquoi… On s’en rend compte dès les premières images, et cela ne fait que se confirmer par la suite, à en devenir ridicule (ou énervant) lorsque l’on a encore le récit en tête. L’hospitalité des mongols n’est même pas mentionnée…

Pour finir cet article, je reprends une belle phrase qu’ils prononcent une fois sauvés, qui résume bien par où ils sont passés (si l’histoire est vraie…) :

Nous allons pouvoir recommencer à vivre.

Slavomir Rawicz (1915-2004) était un officier de la cavalerie polonaise pendant la seconde guerre mondiale. The Long Walk » est le seul livre qu’il a écrit. Fait prisonnier en 1939 par l’armée soviétique, envoyé au goulag, il s’en évade donc avec six autres détenus. Des sa parution en 1956, des critiques, notamment celles de l’explorateur Peter Fleming et du tibétologue Hugh Richardson, sont venues remettre en question l’authenticité du récit.

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