J’ai eu envie de lire le prix Goncourt, appréciant le personnage de Kamel Daoud à travers ses interviews, et connaissant le sujet de ce livre, à savoir les dix années de guerre civile qu’a connu l’Algérie dans les années 90, entre l’armée et le Front Islamique du Salut, qui avait gagné les élections.
Autant le dire tout de suite, je n’ai pas du tout passé un bon moment de lecture, et j’ai du me forcer pour aller jusqu’au bout.
Ces longs monologues chargés de répétitions m’ont empêché de rentrer dans l’histoire, et le style littéraire de l’auteur encore plus, qui prime manifestement sur le contenu, qui est lui délivré au compte goutte : l’ennui est vite présent et m’a rarement quitté. Il y a aussi toutes ces phrases où le prophète est invoqué par les uns et par les autres à tout bout de champ, ainsi qu’un côté morbide très présent, tout le long, tout le temps.
Que ce soit Aube, le personnage principal du roman, qui s’adresse à l’enfant qu’elle a dans son ventre, puis Aïssa le chauffeur-libraire, et encore l’imam de la mosquée du village de Had Chekala, toutes leurs logorrhées où on a l’impression soit qu’ils parlent à un abruti, soit qu’ils sont abrutis eux-mêmes par leurs propres mots, m’ont vite lassées.
Mais alors l’Histoire dans tout ça ? Ce qui ressort de ce roman est assez terrible, d’abord pour la place des femmes dans la société algérienne décrite, ou plutôt l’absence de place, réduite en fait à quasiment aucun droit. Si cette société est telle que la décrit Daoud, c’est franchement inquiétant. Ensuite ce silence ordonné par la loi sur les dix ans de guerre, qui a manifestement été de l’ordre de l’horreur (comme toute guerre finalement) et dont l’auteur appuie le côté morbide avec des fanatiques égorgeant sans distinction aucune des villages entiers. Et pour finir l’omniprésence de la religion forcément, qui écrase tout et tout le monde. On n’en saura guère plus sur le côté historique de cette guerre civile, ce que j’attendais en fait.
Je n’avais déjà pas aimé le style de l’auteur dans son livre Meursault contre-enquête (prix Goncourt premier roman 2015 d’ailleurs). Voilà ce que j’avais écrit à l’époque :
Je n’ai pas du tout accroché. Même si c’est très bien écrit, il ne m’en reste qu’une longue lamentation assez déplaisante,
Je peux faire à peu près le même constat pour celui-ci. La question que je me pose, c’est pour qui écrit Kamel Daoud ?
Kamel Daoud, né en 1970, est un écrivain et journaliste franco-algérien d’expression française, humaniste autoproclamé. Très critique vis-à-vis de l’Islam, cela lui a valu pas mal d’ennuis, dont une fatwa par un imam salafiste algérien, et plus tard d’être accusé d’islamophobie par un collectif composé d’historiens, d’anthropologues ou de sociologues, probablement issus d’une certaine gauche.