Je n’avais jamais rien lu de cet auteur, alors quand j’ai vu cette belle édition chez Quarto, classée sous la rubrique « Voyage » chez le libraire, ça m’a forcément donné envie.
JC Rufin, médecin de formation, a été l’un des pionniers de Médecins sans frontières. Il a également eu une carrière dans les ministères et la diplomatie (ambassadeur de France au Sénégal).
La couverture est belle avec cette ancienne carte du monde, le recueil sous-titré « Romans historiques »… Le titre lui-même me faisait penser à La mort en Arabie de Thorkild Hansen, puisque l’on appelait l’actuel Yemen « L’Arabie heureuse » à l’époque des Lumières. Enfin, sur le quatrième de couverture, un extrait de l’avant-propos de l’auteur précise :
À eux quatre, ces romans constituent une sorte de fresque qui, du XVe au XVIIe siècle, développe un même thème, celui de la rencontre des civilisations. Ils restituent autant d’étapes de la dramatique collision de l’Europe avec d’autres peuples, d’autres mémoires et d’autres pensées. Ils forment une longue chronique des malentendus, des occasions manquées, des incompréhensions qui ont abouti à la situation contemporaine.
Pour moi, c’était sûr, j’allais partir dans un récit historique et apprendre plein de choses. Ce ne sera que (très) partiellement vrai, et une déception, ceci dès le premier roman. L’auteur est un adepte du roman d’aventure romanesque, avec des héros solaires auxquels on sait immédiatement que rien ne fâcheux ne peut arriver. C’est bien écrit, et même soigné, parfois un peu trop, très fluide, on tourne les pages et les péripéties qui se suivent sont aussi vite résolues.
Alors certes, la trame générale de chaque roman correspond à des faits qui se sont réellement passés, et qui méritent d’être contés. L’auteur s’est documenté et le contexte est fidèlement rendu, mais le besoin d’y mettre au centre une histoire d’amour et d’en faire la trame principale de l’histoire en retire beaucoup d’intérêt. C’est un avis personnel, apparemment l’auteur a de nombreux lecteurs enthousiastes, a obtenu le prix Goncourt pour Rouge Brésil, et il a comme on dit trouvé son public (ce qui semble important pour lui).
Attention, tout n’est pas négatif loin de là, j’ai surtout été trompé par cet avant-propos de l’auteur, un peu prétentieux je trouve : la coquille est belle, mais elle m’a parue vide. Il s’agit de littérature grand public, et ce n’est pas un hasard. Voilà ce que dit l’auteur :
Je trouve que le mainstream, le fait d’écrire pour un grand nombre, est quelque chose de respectable. C’est aussi une transgression sans doute peut-être. En France en tout cas, le mainstream est un peu mal vu. Or, je crois qu’on peut être exigeant, on peut essayer d’écrire le mieux possible et d’exprimer les choses le plus profondément possible tout en les rendant accessibles à un grand nombre. Je n’ai pas la coquetterie de me dire que moins je suis lu, meilleur c’est, ou autre. Cela ne veut pas dire non plus qu’être très lu veut dire que c’est très bon. Ce n’est pas aussi simple. C’est, à mon sens, un défi considérable de pouvoir être lu par beaucoup en essayant de conserver cette qualité, enfin, une qualité en tout cas.
Je respecte, mais je trouve que c’est au détriment du fond.
Petite déception aussi donc pour cette édition Quarto, qui m’avait habitué à plus de qualité. Chaque roman est suivi d’une partie « Accueil de la presse et réception de l’œuvre ». On y trouve beaucoup d’éloges, l’un des articles compare même JC Rufin à Joseph Conrad !! Je peux vous assurer qu’on en est très loin, autant par la forme que par le fond. Quant aux préfaces de chaque roman, je les ai trouvé sans grand intérêt, et toujours promptes à dévoiler l’intrigue du roman que l’on s’apprête à lire. Par contre, les autres textes de l’auteur qui suivent les romans sont intéressants, tout comme les entretiens et conférences qui viennent ensuite, ainsi que les repères biographiques qui retracent l’itinéraire tout de même remarquable de J.-C. Rufin.
Voyons tout de même un peu de quoi chaque histoire retourne, notamment le fait historique choisi :
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