Archives de catégorie : Littérature

Nous autres – Eugène Zamiatine

Ce livre m’avait été chaudement recommandé par une libraire de la Fnac, visiblement passionnée. Eugène Zamiatine (écrivain, mathématicien et ingénieur) a écrit ce livre en 1920, soit quelques années avant l’arrivée de Staline au pouvoir.
Quelques années plus tard, il écrira à Staline pour demander l’exil, afin de pouvoir continuer à écrire, arguant que la création est un but en soi, et ne peut se limiter à servir une cause. Tout est dit.
Roman de science-fiction ou de politique fiction, novateur pour l’époque, il a probablement influencé l’écriture de 1984 (George Orwell) et Le Meilleur des mondes (Aldous Huxley).

Il décrit une société totalitaire ou l’individu n’a de place qu’au sein du système, partie infinitésimale et donc négligeable. Le hasard n’a pas de place, tout est prévu… Le ‘taylorisme’ poussé jusqu’à l’extrème, chaque minute de la journée (ou presque) est organisée. Mais une femme va passer par là, et l’univers si ordonné va peu à peu s’effriter… Le héros va commencer à rêver, à se poser des questions…Extrait :

« C’est fou ! Cela ne tient pas debout. Tu ne vois pas que ce que préparez, c’est la révolution ?
– Oui, c’est la révolution, pourquoi cela ne tient-il pas debout ?
– Parce qu’il ne peut pas y avoir de révolution. Parce que notre révolution a été la dernière et qu’il ne peut plus y en avoir. Tout le monde sait cela. »
Je vis se dessiner le triangle moqueur de ses sourcils:
« Mon cher, tu es mathématicien, bien plus, tu es philosophe-mathématicien, eh bien cite moi le dernier chiffre.
– Quoi ? Je ne comprend pas, quel dernier chiffre ?
– Eh bien, celui du dessus, le plus grand !
– Mais, I, c’est absurde. Le nombre des chiffres est infini, il ne peut y en avoir un dernier.
– Alors pourquoi parles-tu de la dernière révolution ? Il n’y a pas de dernière révolution, le nombre des révolutions est infini. La dernière, c’est pour les enfants: l’infini les effraie et il faut qu’ils dorment tranquillement la nuit…

La persuasion clandestine – Vance Packard

packard.jpg Dans un article récent intitulé Société individualiste ?, il est fait mention du livre de Vance Packard, La persuasion clandestine (Titre original The hidden persuaders). J’ai trouvé un article parlant de ce livre sur le web, et en ce temps de future campagne électorale, c’est vraiment d’actualité, même si le livre date de 1957 ! C’est même un ouvrage de référence sur la manipulation en période électorale.

Il décrit comment les politiques américains, dès les années 50, en sont venus à adopter les techniques des publicitaires pour mieux manipuler les électeurs. Manipulation des symboles, Pavlov et ses réflexes conditionnés, Freud et l’image du père, etc… On considère les électeurs comme des spectateurs-consom-mateurs de la politique (et dans consommateurs, ily a sommateurs). Extraits: Continuer la lecture… La persuasion clandestine – Vance Packard

Adolfo Bioy Casares

casares.jpg En ce moment je lis Adolfo Bioy Casares (1914-1999). Le livre Romans regroupe les 8 romans qu’il a écrit.

Ecrivain argentin, grand ami de Jorge Luis Borges, ses romans sont marqués par un réalisme que vient altérer le fantastique. Le « héros » des romans cherche à comprendre ce qui lui arrive, et le lecteur aussi… mais rien à faire, l’histoire est bien ficelée et vous emporte. C’est remarquablement écrit, très lisible (des phrases courtes, claires, précises).

J’ai lu les 3 premiers romans (j’y ajoute la première phrase, l’incipit…):

L’invention de Morel: Aujourd’hui, dans cette île, s’est produit un miracle.

Plan d’évasion: Il y a à peine un jour que je suis dans ces îles et j’ai déjà vu quelque chose de tellement grave qu’il me faut bonnement et simplement t’appeler au secours. Je vais tenter de m’expliquer en procédant par ordre.

Le songe des héros: A la fin des 3 jours et des trois nuits du Carnaval de 1927, la vie d’Emilio Gauna atteignit son premier et mystérieux paroxysme.

Le roman suivant s’intitule Journal de la guerre au cochon. C’est par lui que je suis venu à lire Casares. J’écoutais Charivari sur France-Inter, et le journaliste faisait un parralèle entre l’histoire de ce roman et la situation démographique et sociale d’aujourd’hui ou de demain.
L’histoire se situe dans une ville qui pourrait être Buenos-Aires, occupée par des vieux qui ont des ressources. Les jeunes sont relégués en banlieue, et sont sans ressources. Un démagogue les pousse à lyncher les vieux…

Le pressentiment – Emmanuel Bove

pressentiment.jpg Je viens de finir le pressentiment, d’Emmanuel BOVE (1898-1945). Né et mort à Paris, auteur prolixe dans les années 20 et 30, il connût le succès et tomba curieusement dans l’oubli.

L’histoire se passe en 1931, un type (avocat) issu d’une famille aisée, bourgeoise, choisit de les quitter tous (incapables d’un geste désintéressé) pour aller s’installer rue de Vanves, près de Montparnasse, dans un quartier miséreux.

On y voit la dureté des conditions de vie de l’époque, la difficulté de se faire accepter quand on vient d’un milieu différent, malgré tous ses efforts. Il cherche autre chose, une autre vie… ou peut-être a-t-il déjà le pressentiment de sa mort…

Un petit livre qui se lit vite et facilement, avec des descriptions à la Zola (sauf qu’on est presque 50 ans plus tard)… Zola qui disait « être pauvre à Paris, c’est être pauvre 2 fois ». Un très bon moment de lecture.

La bonne nouvelle, c’est que Jean-Pierre Daroussin (qui est fan de ce livre) a décidé d’en faire un film. Il devrait sortir au mois d’août. Voilà un article sur Télérama qui en parle.

Le langage silencieux – Edward T. Hall

le langage silencieux Je viens de finir Le langage silencieux d’Edward T. Hall, un anthropologiste. J’avais lu ce livre il y a quelques années, sur les conseils d’un ami, et j’avais envie d’y revenir. Il tente une définition de ce qu’est la culture ; le bouquin date de 1959, c’est une première à l’époque.

Si l’approche est scientifique et un peu rébarbative parfois, le livre se lit facilement et nous apprend plein de choses sur nous-mêmes, et bien sûr sur les autres (puisque c’est la même chose). Voilà une partie de sa conclusion.

Continuer la lecture… Le langage silencieux – Edward T. Hall

Paycheck – Philip K. Dick

couverture paycheck Je viens de lire la nouvelle de Philip K. Dick « Paycheck », dont on a fait un film il y a 2 ans (réalisé par John Woo, Hollywood).

Cette nouvelle a été publiée en 1953 (Dick a été publié pour la première fois en 1952), et fais à peine 60 pages d’un bouquin format poche, écrit assez gros. Le style est plutôt brut, les événements s’enchaînent, les personnages peu décrits, tout repose sur le scénario de départ: perte de mémoire et 5 objets en poche… qui vont l’amener au but, assez peu moral en fait : avoir sa part du gâteau !

Tout ça pour dire que quand on sait tout ce qu’a écrit Philip K. Dick, la complexité psychologique de ses personnages (schizo ou parano la plupart du temps), la qualité de ses scénarios, des futurs envisagés sous l’angle du rapport à la société de l’humain (souvent parano et brutale elle aussi)… L’empathie…

Hollywood choisit une de ses premières nouvelles, y ajoute plein d’effets spéciaux, de la violence, de la pensée formatée… c’était la même chose avec Minority Report… alors qu’il y aurait tellement mieux à faire avec les œuvres de Philip K. Dick.

Désolant !

American Darling – Russel Banks

american darling Je viens de finir American Darling, le dernier roman de Russel Banks.
L’histoire d’une femme américaine rebelle dans sa jeunesse (engagement révolutionnaire dans les années 60) qui fuit les US et se retrouve au Libéria, ou elle se marie. Elle retournera aux US finir sa vie.
Si l’histoire de la création de l’état du Libéria est passionnante, puis les révolutions de Doe, Jonhson, Taylor… pour le reste je suis resté sur ma faim. Un bon bouquin, sans plus. Très américain avec cette fille de famille plus qu’aisée, qui se passionne pour les chimpanzés, un truc récurrent chez les nantis on dirait ! ça a l’air à la mode !!… bref, on a du mal à s’intéresser à son sort.
J’ai découvert Russel Banks avec Continents à la dérive: celui-là, lisez-le, on y repense plusieurs jours après l’avoir terminé !

Autres romans de Russel Banks sur ce blog :