Voilà un roman que l’on m’a donné en me disant : « Super, je ne l’ai pas lâché ! ». En fait, la personne l’avait lu au cours d’une longue journée de train, puis partait en randonnée le lendemain, alors autant alléger le sac à dos, fût-ce de 200 grammes !
Je ne partagerai pas son enthousiasme. C’est l’histoire d’un homme, Cooper, et de Finch sa petite fille de 8 ans qui vivent retirés du monde dans un chalet en pleine nature. L’homme, ancien militaire, se cache et élève sa fille seul, loin du monde. Ils sont ravitaillés une fois par an en denrées de base par un ancien ami de Cooper.
Si le suspense est bien entretenu au début du roman (mais que peut bien fuir Cooper ?), on finit par connaître assez vite la raison de tout cela. Et à se rendre compte du peu de crédibilité d’une telle histoire, et il en sera de même pour les personnages de ce roman. Quant à la fin, en mode « happy end » comme il se doit, on atteint les sommets.
Bref, un roman de gare, oui, parfait pour oublier un long trajet. Pour le reste, hélas, pas grand chose à signaler, et effectivement, beaucoup trop lourd pour le mettre dans le sac à dos. 😎
Kimi Cunningham Grant n’a pas encore de page Wikipedia. Il en faudra sans doute beaucoup plus que ce roman…
C’est à La petite librairie que j’ai entendu parler de ce livre, et comme Robert Penn Warren est l’auteur de Tous les Hommes du Roi, un excellent roman, je l’ai commandé.
La très bonne préface décrit le contexte historique du roman : au début du XXe siècle, dans le Sud des États-Unis, les petits producteurs de tabac sont pris à la gorge par les grandes compagnies qui s’entendent pour leur payer le tabac un prix dérisoire. Le capitalisme et l’hypocrisie libérale de la loi de l’offre et de la demande sont déjà à l’œuvre…
Les petits producteurs vont tenter de s’unir pour lutter contre ce cartel, mais tous ne jouant pas le jeu, la violence va vite devenir légitime et la situation se dégrader irrémédiablement. À ce jeu, Percy Munn, un jeune avocat épris de justice va vite se perdre et voir sa vie totalement bouleversée.
Le roman est assez sombre dans l’ensemble (et pas seulement parce que tout ou presque se passe la nuit). Percy Munn fait des choix qu’il a du mal à s’expliquer, donnant l’impression aux autres d’une grande force alors qu’au fond de lui-même le doute est omniprésent. Il se renferme alors peu à peu sur lui-même alors que le mouvement s’effondre, jusqu’à vouloir commettre l’irréparable. C’est le point central de ce roman, plus que la lutte des petits producteurs contre les grandes compagnies. Comme l’explique un personnage à Munn :
D’une manière ou d’une autre, ce que l’on fait, c’est ce qu’on a dans la tête. Un homme suit son chemin et, même s’il regarde ailleurs, quand le moment est venu, la chose qu’il porte en lui se manifeste sans qu’il s’en aperçoive. Ce qui le fait agir, ce n’est pas un accident fortuit ; de tout temps, la chose était en lui. Seulement, il ne le savait pas. Tant que le moment n’était pas venu.
Robert Penn Warren (1905-1989) est un écrivain américain. Il a reçu le Prix Pulitzer pour ce roman en 1947, puis le Prix Pulitzer de la poésie en 1957 et 1979 : il est ainsi le seul homme de lettres à avoir été récompensé dans ces deux catégories. Le Cavalier de la Nuit est son premier roman.
Un petit article à propos de GrapheneOS, dont je suis toujours très satisfait et enthousiaste. Courant mai, une nouvelle option est apparue que j’attendais depuis le début, ce sont les Contact Scopes. C’était essentiellement pour pouvoir installer WhatsApp tout en l’empêchant d’accéder à tout mes Contacts.
Et puis suite à un commentaire sur l’article précédent à propos de GrapheneOS, un lecteur me demandait si j’avais testé la GCam, la caméra de Google. Ce n’était pas le cas, et je me suis dit qu’il était temps de l’essayer.
Voilà donc les deux sujets abordés dans cet article…
Quand j’ai entendu parler de ce livre (l’auteur a bénéficié de quelques promotions dans les mass media), j’ai eu envie de le lire : un « Black Hat » qui devient « White Hat », ça doit faire une belle histoire.
Mais je m’attendais à autre chose, et j’ai été globalement déçu, même si l’histoire mérite d’être contée. Côté littérature, c’est lisible mais on sent les retouches, comme certaines phrases en fin de paragraphe qui tentent de donner un pseudo style littéraire à ce qui n’en a pas vraiment besoin d’ailleurs.
Non, la déception vient de ce que j’attendais : un vrai hacker qui nous parle de ses techniques de hacking, comment il pénètre certains réseau etc… L’auteur a manifestement choisi d’être accessible au grand public, et on a le récit d’un surdoué de l’informatique certes (tombé dedans quand il était petit), et qui va très vite utiliser ses talents pour se faire de l’argent : trafic de cartes bleues, fausse monnaie… Il s’agit d’ailleurs le plus souvent d’aller sur le « darknet » acheter ou vendre des choses illégales, que d’autre chose. Le pire c’est que l’auteur est très jeune et tout cet argent ne lui sert pas vraiment, à part s’acheter de belles fringues et faire le beau… L’image que j’ai vite eu du personnage, c’est celle d’un escroc, tout simplement.
Quand il se fait arrêter, il s’en sort avec une peine légère car il est encore mineur. C’est l’aussi occasion pour lui de découvrir les gens qui travaillent contre la cybercriminalité, et d’y trouver sa vocation. Florent Curtet peut au passage remercier ses parents qui l’ont toujours soutenu, aidé et payé l’amende de sa condamnation. Le récit ne dit pas s’il a réussi à garder un magot quelque part, et a pu en faire profiter ses parents (je l’espère pour eux). 😉
La deuxième partie, disons « la rédemption » et le passage en White Hat, est finalement assez intéressante quand il explique ce qu’il fait et comment. Il a pourtant encore cette tendance à être « borderline », à ne pas respecter les règles, et ses justifications ne sont pas toujours convaincantes. Il se fera arrêter une nouvelle fois : à force de naviguer en zone grise, il s’octroie quelques défraiements alors qu’il joue l’intermédiaire entre un cabinet d’avocats et un groupe de hacker. Là encore, ce sont les parents qui paient la caution. À ce jour, il serait en attente de jugement, interdit d’exercer ses activités de médiateur.
Le titre est bien sûr un clin d’œil au film « Arrête-moi si tu peux », de Spielberg. Au final, pas inintéressant, mais globalement décevant, encore que cela dépend peut-être de moi. À noter la préface d’Éric Naulleau, particulièrement oiseuse.
Florent Curtet est un expert en cybersécurité qui a travaillé pour l’ONU, Interpol ou des sociétés du CAC40. Il a fondé l’ONG « Hackers sans frontières » destinée à aider les victimes de cyberattaques, et aussi fondé une société « NEO Cyber » qui assure une formation pour négocier avec des cyber-attaquants.
Le 10 juin dernier, Debian 12 sortait en version « release » et passait de fait en version « stable ». Comme conseillé, j’attendais environ un mois avant de repasser mon PC en version « testing », afin de bénéficier des dernières versions de logiciels, l’environnement Gnome, etc… Un bon compromis, si l’on accepte d’avoir quelques soucis de temps en temps et de mettre les mains dans le cambouis…
L’opération est toute simple et consiste à modifier le fichier /etc/apt/sources.list et de remplacer le mot bookworm par testing (ou trixie), puis de lancer la commande suivante :
$ sudo apt full-upgrade
Auparavant, on aura pris soin de faire un sudo apt update ; sudo apt upgrade comme il se doit.
La mise à jour s’effectue, et après un redémarrage me voilà en Debian 13 « trixie » : 😎
$ lsb_release -a
No LSB modules are available.
Distributor ID: Debian
Description: Debian GNU/Linux trixie/sid
Release: n/a
Codename: trixie
Tout s’était bien passé apparemment… jusqu’à ce que je veuille lancer une VM : virt-manager restait en état « Connexion… » et pas moyen d’en sortir :
NOTE : même en mode commande : $ virt-manager –debug, je n’ai pas plus d’infos…
systemd logo
Le problème survient après quelques minutes de fonctionnement : au démarrage tout va bien, puis après quelques minutes, virt-manager ne se connecte plus.
Ça m’a obligé à faire pas mal de tests avec le service libvirt et permis d’apprendre à contrôler cette partie, alors voilà le résultat de mes investigations. À la fin de l’histoire, c’est apparemment un bug de systemd (régression), dont il ne reste qu’à attendre la correction. Cela fait partie des risque d’utiliser la version « testing » de Debian ! 😉 Mais au moins j’y vois désormais un peu plus clair avec KVM et surtout libvirt, l’interface réseau virbr0 et les réseaux virtuels créés pour les VMs.
Et je termine ma série Edward Bunker par son premier roman, celui qui lui offrit la reconnaissance, et certainement le plus complet, le plus abouti.
Max Dembo sort de San Quentin en liberté conditionnelle, et bien décidé à rester dans le droit chemin. Hélas, Rosenthal, son directeur de conditionnelle est du genre psycho-rigide et lui impose des contraintes que Max ne peut accepter. Alors entre ses anciens amis peu fréquentables, et la quasi impossibilité de trouver un emploi en devant déclarer « je sors de prison », la partie n’est pas gagnée…
Quand Rosenthal va le faire enfermer une semaine pour une simple suspicion (erronée) de consommation de drogue, Max va craquer et retourner du mauvais côté de la loi. Il va monter deux cambriolages avec un certain succès, et même rencontrer une femme avec qui il s’entend à merveille… Malgré la tension permanente d’une vie de fugitif, il semble plutôt bien s’en sortir même s’il se sait en sursis. Puis viendra le gros coup, une bijouterie, qui permettrait d’être tranquille un bon bout de temps. Tout est préparé avec minutie et professionnalisme, à la minute près. Mais tout va basculer, et Max va se retrouver pourchassé par la police, l’instinct de survie à fleur de peau, avec la dose de paranoïa indispensable.
C’est un grand roman noir, Bunker y décrit très bien le cheminement qui ramène Max presque inexorablement vers le seul monde qu’il connaît. Ses pensées, ses raisonnements, ses réactions sont finement décrites, comme la description des changements qui se sont opérés dans Los Angeles pendant son long séjour en prison… On est happé par le destin presque écrit par avance, encore que la fin réserve une surprise…
Petit extrait révélateur, lorsqu’un barman refuse de répondre aux questions de Max. Ce dernier l’insulte copieusement, prêt à lui sauter à la gorge :
Ma salive gicla jusqu’à lui. Ses yeux s’écarquillèrent. Le mépris se trouva soudain remplacé par la peur. Il battit en retraite jusqu’à se cogner contre le comptoir derrière lui.
Je tremblais — mais la vue de son visage dissipa mes furies. Seul le vague souvenir, surgi du fond de ma mémoire, qu’une bagarre verrait mon retour en prison, m’avait empêché de plonger au-dessus du bar et de le frapper jusqu’à l’inconscience. Et si mes paroles de furies n’avaient pas déclenché la réaction voulue, j’aurais été prêt à aller jusqu’au bout malgré tout. J’avais l’habitude des hommes qui se respectaient les uns les autres — non par simple savoir-vivre, mais parce que chacun savait que l’autre était dangereux et que le moindre manquement pouvait dégénrer en violence, voire en meurtre, aussi brutalement qu’une éruption de volcan.
C’est ce roman, écrit en prison, qui va le faire découvrir comme écrivain, grâce à la protection de Louise Wallis, l’épouse d’un producteur d’Hollywood. Il lui aura fallu dix-sept années d’écriture, et six romans refusés, pour être enfin publié.
Edward Bunker (1933-2005) est un écrivain américain auteur de romans policiers, et scénariste de cinéma. Il fut le plus jeune détenu (17 ans) à être incarcéré à San Quentin, l’un des pénitenciers les plus durs des États-Unis (deux évasions à son actif, dont une de deux ans). Il sort pour la dernière fois de prison en 1975, soit à 42 ans ! Il a notamment écrit :
No Beast so Fierce (1973, Aucune bête aussi féroce, adapté à l’écran sous le titre Straight Man (1978), Le Récidiviste avec Dustin Hoffman). Ce roman donc.
The Animal Factory (1977, La Bête contre les murs, adapté à l’écran sous le titre éponyme (2000) avec Willem Defoe).
Little Boy Blue (1981, La Bête au ventre).
Dog Eat Dog (1995, Les Hommes de Proie, adapté à l’écran sous le titre éponyme (2016) avec Nicolas Cage).
Je continue de relire E. Bunker, avec cette fois son quatrième roman, au titre original plus évocateur : « Dog Eat Dog ». Ça ne va pas rigoler…
Ils sont trois, anciens pensionnaires de San Quentin, la célèbre prison de Californie. Dès le premier chapitre, on découvre Mad Dog, accro à l’héroïne, tueur sans scrupule, paranoïaque, dangereux et instable. Diesel, lui s’en sort pas trop mal, avec une femme et un enfant, travaillant pour un syndicat comme exécuteur des basses œuvres comme quand un professionnel ne veut pas jouer le jeu…
Tous deux attendent la sortie de prison de Troy, qu’ils respectent et sont prêts à suivre quoiqu’il propose. Et Troy a bien réfléchi : il va s’attaquer aux gangsters et aux trafiquants de drogue, comme ça personne n’ira se plaindre à la police… Si le premier coup se passe plutôt bien, les choses vont vite mal tourner, et la violence se déchaîner.
Comme toujours avec Bunker, l’histoire se place du côté des truands, vu de leur monde, et avec leurs règles. Ici, l’auteur insiste bien sur le fait que la prison rend les hommes pires à leur sortie que lorsqu’ils y sont entrés. Et on n’est pas déçu, le pire, on va y avoir droit, c’est du roman noir de chez noir ! Un grand polar.
Un film éponyme en a été tiré en 2017, réalisé par Paul Schrader, avec Nicolas Cage : aussi mauvais sur le bouquin est bon ! 🙁 D’ailleurs, Nicolas Cage a tout de même participé à un sacré paquet de navets mine de rien, paraît-il pour assurer son train de vie dispendieux…
Edward Bunker (1933-2005) est un écrivain américain auteur de romans policiers, et scénariste de cinéma. Il fut le plus jeune détenu (17 ans) à être incarcéré à San Quentin, l’un des pénitenciers les plus durs des États-Unis (deux évasions à son actif, dont une de deux ans). Il sort pour la dernière fois de prison en 1975, soit à 42 ans ! Il a notamment écrit :
No Beast so Fierce (1973, Aucune bête aussi féroce, adapté à l’écran sous le titre Straight Man (1978), Le Récidiviste avec Dustin Hoffman).
The Animal Factory (1977, La Bête contre les murs, adapté à l’écran sous le titre éponyme (2000) avec Willem Defoe).
Little Boy Blue (1981, La Bête au ventre).
Dog Eat Dog (1995, Les Hommes de Proie, adapté à l’écran sous le titre éponyme (2016) avec Nicolas Cage). Ce roman donc.
Deuxième lecture d’Edward Bunker après La Bête au ventre (je ne les lis pas dans l’ordre, mais peu importe), ce roman traite plus particulièrement de l’incarcération, de la vie en prison.
Ron, 25 ans, fils de bonne famille, mais trafiquant de drogue à la belle vie (argent facile), se retrouve emprisonné à San Quentin. Il se retrouve confronté au monde sans pitié de la prison, et se fait vite remarquer avec sa jeunesse et sa belle gueule… Heureusement, il va trouver une protection en la personne de Earl, un vieux briscard membre de La Fraternité Aryenne, confrérie qui protège les prisonniers blancs.
Ron découvre un monde où le moindre signe de faiblesse est immédiatement exploité, et où la guerre raciale est omniprésente et peut se déclencher à tout moment… Il a apprendre à survivre dans ce milieu, et va trouver en Earl une sorte de père et un ami avec qui échanger des idées ou partager des lectures. Ron attend la révision de son jugement et espère sortir assez rapidement pour bonne conduite. Mais dans cet univers qui change les hommes radicalement, tout ne va pas se passer comme prévu…
La prison a deux codes de lois, apprit Ron, celui de l’administration et celui des prisonniers. Afin de pouvoir retrouver la liberté, le prisonnier ne doit pas être pris à enfreindre la loi de l’administration, qui ressemble très vaguement aux limites qu’impose la société. Mais pour survivre, il doit suivre les codes des bas-fonds.
Un roman captivant, et assez terrible sur les conditions de vie dans une telle prison.
Edward Bunker (1933-2005) est un écrivain américain auteur de romans policiers, et scénariste de cinéma. Il fut le plus jeune détenu (17 ans) à être incarcéré à San Quentin, l’un des pénitenciers les plus durs des États-Unis (deux évasions à son actif, dont une de deux ans). Il sort pour la dernière fois de prison en 1975, soit à 42 ans ! Il a notamment écrit :
No Beast so Fierce (1973, Aucune bête aussi féroce, adapté à l’écran sous le titre Straight Man (1978), Le Récidiviste avec Dustin Hoffman).
The Animal Factory (1977, La Bête contre les murs, adapté à l’écran sous le titre éponyme (2000) avec Willem Defoe), ce roman donc.
Little Boy Blue (1981, La Bête au ventre).
Dog Eat Dog (1995, Les Hommes de Proie, adapté à l’écran sous le titre éponyme (2016) avec Nicolas Cage).
J’utilise depuis longtemps l’excellente extension Dash to Dock pour Gnome, elle remplace avantageusement le dock par défaut de Gnome qui manque singulièrement d’options.
Hélas, comme je suis sous Testing, bénéficiant par conséquence de versions récentes de Gnome, il y a régulièrement des bugs qui apparaissent avec cette extension (plus précisément, la version de Gnome n’est pas encore supportée), et qui m’obligent soit à en changer en attendant la correction, soit à trouver une autre solution…
Voyons voir cela en détail : les problèmes rencontrés avec Dash to Dock, l’alternative Dock from Dash, et enfin comment forcer l’utilisation d’une ancienne version de Dash to Dock, si cette dernière répond à mes attentes.
C’est l’été, la saison pour aller à la plage, et donc de choisir quelques vieux polars en format poche sur mon étagère… Cette année, j’ai jeté mon dévolu Edward Bunker, qui m’avait laissé de bons souvenirs.
Plus qu’un polar, celui-ci est le récit de l’enchaînement des faits qui vont conduire un gamin de 11 ans vers la case prison, et ce de manière pratiquement inexorable. L’auteur s’attache à expliquer ce qui pousse Alex à agir (ou plutôt à réagir) de la sorte, et c’est passionnant. En plus, c’est certainement en partie autobiographique, puisque c’est un peu le chemin qu’a suivi l’auteur.
Abandonné par sa mère, et le père n’étant pas en situation de l’élever seul, Alex est ballotté de foyers d’adoption en écoles militaires dès l’âge de quatre ans, et va très vite se rebeller. Dès les premières pages du roman, l’auteur nous explique très bien tout ça :
Au départ, ses rébellions avaient été aveugles, moins actes délibérés que réactions réflexes à la douleur — douleur de la solitude et de l’absence d’amour, bien qu’il n’eût pas de nom à l’époque pour ces choses, pas même aujourd’hui encore. Une part de lui échappait à tout contrôle lorsqu’il se retrouvait confronté à l’autorité, et il était enclin à de violentes explosions spontanées devant la plus petite provocation.Les garçons privilégiés, en particulier dans les écoles militaires, le regardaient de haut et déclenchaient ses furies, et leur suite inéluctable de punitions en représailles qui expliquaient les raisons de ses fugues. L’un après l’autre, foyers et institutions militaires annonçaient à son père que le gamin devait partir. D’aucuns le considéraient épileptique ou psychotique, mais son électro-encéphalogramme négatif les avait réfutés, et un psychiatre qui travaillait comme bénévole au Community Chest le trouva normal. À chaque fois qu’il se faisait renvoyer, il gagnait de pouvoir rester auprès de son père, dans le meublé que ce dernier occupait, quelques jours durant, voire une semaine, et il dormait sur un petit lit pliant. Il était heureux pendant ces interludes. Rébellion et chaos avaient leur finalité — il échappait ainsi aux tourments. Le temps qui s’écoulait entre son arrivée et l’explosion commença à se faire de plus en plus court.
Le tableau est dressé, et Alex va se diriger vers son destin, incapable de se maîtriser face à l’injustice, à l’abus d’autorité… À cela vont vite s’ajouter les règles entre jeunes délinquants : ne jamais montrer aucun signe de faiblesse sinon on devient une victime ou une cible, n’accepter ou ne proférer aucune insulte ou remarque désobligeante (le code sur ce que l’on peut dire ou non est déjà très strict…). La seule réponse possible est toujours la même : la violence quelqu’en soit les conséquences. L’auteur décrit bien d’où viennent tous ces jeunes :
Ils étaient nombreux, les ignares et les coléreux, les jeunes noirs illettrés du Sud rural, qui s’étaient retrouvés à Watts au fur et à mesure que le métayage disparaissait au profit d’une mécanisation de l’agriculture ; leurs parents cherchaient un emploi d’ouvrier d’usine et eux se retrouvaient livrés à eux-mêmes dans les rues de la cité. Les Chicanos, et ils étaient nombreux dans ce cas, racontaient des histoires similaires, sauf que leurs parents étaient venus de l’autre côté de la frontière. Et les accents d’Oklahoma étaient fréquents chez les Blancs : c’était les enfants du Dust Bowl, ou alors, ils étaient nés de foyers brisés ou de parents alcooliques. Des jeunes de toutes races, incapables de traiter le moindre problème autrement que par des explosions de furie,des enfants dérangés, victimes ultimes de maladies de famille et de société, pareilles à une litanie sans fin.
Une chose tout de même différencie Alex des autres : il est loin d’être stupide et s’exprime bien (il doit même faire attention à adapter son langage en fonction de son interlocuteur s’il veut éviter des ennuis). Son seul refuge est la lecture et il n’est jamais aussi calme et serein que lorsqu’il est au trou avec quelques livres.
Il profitera de quelques moments de liberté entre deux établissements, à la faveur d’une évasion ou d’une conditionnelle, sans vraiment savoir quoi en faire finalement, sans autre rêve que d’avoir de belles fringues et de voler une voiture, trop jeune qu’il est pour imaginer autre chose que de profiter du moment présent. Il se persuade petit à petit qu’il est destiné à vivre de l’autre côté de la loi, et son audace grandit avec le temps. On le quittera à 16 ans, lors d’un braquage qui tourne mal et qui l’enverra sans doute en prison.
Edward Bunker (1933-2005) est un écrivain américain auteur de romans policiers, et scénariste de cinéma. Il fut le plus jeune détenu (17 ans) à être incarcéré à San Quentin, l’un des pénitenciers les plus durs des États-Unis (deux évasions à son actif, dont une de deux ans). Il sort pour la dernière fois de prison en 1975, soit à 42 ans ! Il conteste plus ou moins son passé de criminel, en déclarant :
Si je devais mettre sur une balance tout ce que j’ai fait à la société et tout ce que celle-ci m’a fait, je ne sais de quel côté elle pencherait.
Il faut sans doute comprendre cette phrase dans le sens où les prisons américaines sont extrêmement dures, et l’on en ressort souvent pire que lorsqu’on y est entré, inadapté à la société qui de toutes façons vous rejette. C’est le sens de plusieurs de ses romans d’ailleurs.
Il a notamment écrit :
No Beast so Fierce (1973, Aucune bête aussi féroce, adapté à l’écran sous le titre Straight Man (1978), Le Récidiviste avec Dustin Hoffman).
The Animal Factory (1977, La Bête contre les murs, adapté à l’écran sous le titre éponyme (2000) avec Willem Defoe).
Little Boy Blue (1981, La Bête au ventre), ce roman donc.
Dog Eat Dog (1995, Les Hommes de Proie, adapté à l’écran sous le titre éponyme (2016) avec Nicolas Cage).
Il a également joué comme acteur, toujours pour de brèves apparitions, notamment dans Le Récidiviste et Animal Factory, mais aussi dans Reservoir Dogs de Quentin Tarantino (M. Blue), ou encore Running Man de Paul Michael Glaser (Lenny).
Quentin Tarantino, Michael Madsen, Edward Bunker, and Steve Buscemi dans Reservoir Dogs.
Enfin, le personnage de Nate, un criminel de carrière qui s’occupe de recel dans le film Heat (1995), joué par Jon Voight, aurait été inspiré par Bunker, qui était consultant pour le réalisateur Michael Mann.
Lectures, Ubuntu, Smartphone, Cinéma, entre autres…