Les idées des autres – Simon Leys

En commençant ce livre, j’étais assez confiant puisque, étant fan de Simon Leys, un recueil de citations sélectionnées de sa main ne pouvait logiquement que me plaire…

Ce ne fût malheureusement pas vraiment le cas, je trouvé cette sélection assez inégale d’une part, et pour une autre part très empreintes de religiosité. Je sais que Simon Leys était très croyant, ce n’est donc qu’une demi surprise !

Certaines sont très  « intellectuelles », mais manquent au fond de vérité, la recherche du bon mot ayant pris le pas sur l’idée. Heureusement d’autres sont percutantes et éclairent un sujet d’une lumière nouvelle. Il y a aussi celles qui ne me parlent pas du tout… Un bon paquet sont donc aux connotations religieuses marquées (Simone Weil, et surtout Léon Bloy qui est le plus cité, et catholique traditionaliste). Finalement, je préfère les citation chinoises, elles sont souvent plus poétiques !

Elles sont toutes données dans leur langue originale (y compris les idéogrammes chinois), et ensuite traduites en français par les soins de l’auteur. Je reste tout de même un peu déçu donc de ce bric-à-brac de citations collées les unes aux autres, certes classées par sujet, et dans une édition de qualité. Peut-être n’étais-je pas réceptif à certaines citations, il faut aussi un état d’esprit en phase avec le sujet traité, ou avec ce mode d’expression « concentré ».

En voici tout de même quelques unes pour votre plaisir :

Dans ma jeunesse, je n’avais jamais connu le goût du chagrin
Mais je me plaisais à hanter les haut balcons
Du haut desquels, pour écrire des poèmes nouveaux, je me forçais à chanter d’imaginaires chagrins.
Aujourd’hui j’ai bu le chagrin jusqu’à la lie
Je voudrais en parler, mais je me tais
Et si j’ouvre la bouche, c’est seulement pour dire : « L’air est frais, quel bel automne ! ».

Xin Qiji

Les gens le long de la plage
Se tournent tous et regardent du même côté
Ils tournent le dos à la terre
Et regardent la mer toute la journée
… … … … …
Ils ne peuvent pas regarder bien loin
Ils ne peuvent pas regarder bien profond
Mais ça ne les empêche jamais
De contempler quand même

Robert Frost

Si vous me demandez quelles sont les épreuves qu’il a dû traverser, je ne serai pas en mesure de vous répondre. Tout ce que je peux dire, c’est que l’impression qu’il donne est de quelqu’un de blessé, à l’égal, suis-je tenté d’ajouter, de tous ceux à qui fut refusé le don de l’illusion. Ne redoutez pas de le rencontrer : de tous les êtres, les moins insupportables sont ceux qui haïssent les hommes. Il ne faut jamais fuir un misanthrope

Cioran

Si tu attends de la philosophie qu’elle t’apprenne des choses, eh bien, tu peux être tranquille, elle ne t’apprendra rien du tout. Mais si tu te contentes d’y voir une invitation à te faire toi-même ta philosophie, il te reste un peu d’espoir. Remarque que tous les bons philosophes ont tous été des antiphilosophes : Schopenhauer, Nietzsche, Locke et les autres. Ils ont tous été un peu ce que le Canard enchaîné est au Figaro […] Apprends un peu, et tu deviendras toi-même un philosophe, ce qui est bien mieux que d’être un professeur de philosophie, ce qui est en tout cas beaucoup plus gai.

J. Paulhan

Quand un homme a atteint la vieillesse et qu’il a rempli sa mission, il a le droit de confronter en paix l’idée de la mort. Il n’a plus besoin des autres, il les connaît déjà, et les a assez vus. Tout ce qu’il lui faut, c’est la paix. Il n’est pas décent d’aller le trouver, de l’assommer de bavardages, et de lui faire endurer des banalités. Il faudrait passer devant sa porte comme si personne ne vivait là.

H. Hesse

Qui me dit que mon attachement à la vie n’est pas une illusion ? Qui me dit que mon horreur de la mort n’est pas simplement la réaction d’un individu qui, ayant quitté sa maison natale tout enfant, aurait oublié le chemin du retour ?

Zuang Zi

Autres articles sur Simon Leys sur le blog :

Simon Leys, de son vrai nom Pierre Ryckmans, est né en 1935 à Bruxelles. Après avoir étudié le droit et l’histoire de l’art à Anvers, il poursuit des études de langue, de littérature et d’art chinois à Taïwan, Singapour et Hong Kong, devenant un sinologue réputé. En 1971, il publie Les habits neufs du président Mao (1971), première critique virulente de la révolution culturelle qui lui attirera à l’époque l’inimitié de certains intellectuels français maoïstes.

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