N°44, le mystérieux étranger – Mark Twain

N°44, le mystérieux étranger - Mark Twain C’est sur les recommandations d’un ami que j’ai lu ce livre. Il s’agit du dernier roman de Mark Twain, qui ne sera publié qu’après sa mort (1910). Et encore : Mark Twain travailla sur trois versions de ce texte, des versions censurées seront d’abord publiées, et c’est finalement en 1969 que cette version complète et finale est enfin publiée aux U.S.A. En France, ce sont les éditions Tristram qui le publieront en 2011.

Autant le dire tout de suite, je n’ai pas du tout accroché. Mais alors pas du tout, et je me demande bien ce que mon ami a bien pu y trouver… Pour moi, c’est un conte assez enfantin, et où l’on s’ennuie ferme en y cherchant désespérément un intérêt quelconque.

L’histoire se passe au Moyen-Âge, et le narrateur est un jeune apprenti travaillant dans une imprimerie. Son récit est empreint d’une foi religieuse frisant la bêtise pure, plus proche de la superstition que d’autre chose (ce qui était sans doute le cas à l’époque). Arrive un étranger qui dit s’appeler « N°44 série 864962″… Ce dernier a des pouvoirs illimités et va mettre une belle pagaille dans le château, créant des avatars, faisant parler les animaux, j’en passe et des meilleures…. Puis à la fin du récit, il annonce au jeune apprenti :

Tout ce que je t’ai révélé est vrai : il n’y a pas de Dieu, pas d’univers, pas de race humaine, pas de vie terrestre, pas de paradis, pas d’enfer. Tout cela n’est qu’un Rêve, un rêve grotesque et imbécile. Rien n’existe à par Toi. Et Tu n’es qu’une Pensée – une Pensée vagabonde, une Pensée inutile,une Pensée sans attache, errant tristement dans les éternités vides !
Il disparut et me laissa consterné ; car je savais et j’avais compris que tout ce qu’il avait dit était vrai.

Un nihilisme total donc, qui peut expliquer les versions censurées, et le temps qu’il a fallu pour publier la version complète et originale (si tant est que Mark Twain ai considéré le roman comme terminé). Mais bon, franchement, de nos jours, le message paraît largement dépassé, surtout sous cette forme, celle d’un conte pour enfants.

Mark Twain (1835-1910) est un écrivain, essayiste et humoriste américain. Après avoir fait une carrière de militaire, été imprimeur puis journaliste, il se fait connaître par son roman Les Aventures de Tom Sawyer (1876) et sa suite, Les Aventures de Huckleberry Finn (1885). La page wikipedia précise aussi que « Mark Twain est un pamphlétaire virulent et irrévérencieux, notamment lorsqu’il s’en prend à Dieu, à la religion et aux fondements du christianisme ».

Vernon Subutex Tome 1 & 2 – Virginie Despentes

Vernon Subutex - Virginie Despentes Premier roman de Virginie Despentes que je lis : cet été, je vois un ami terminer le tome 1 de Vernon Subutex en étant semble-t-il très accroché aux dernières pages… Étant à court de lecture, il me le recommande, et je le lui emprunte. Ce fut une bonne surprise.

Le style est assez alerte, fait de courtes phrases qui s’enchaînent à grande vitesse. On est pris par le rythme, on a envie de tourner les pages, même s’il faut ralentir pour tout capter car il en est dit beaucoup, dans ces phrases toutes simples. La description des (nombreux) personnages de l’intrigue, comme celle de la société, est presque brutale, sans concession. La triste condition humaine, revue et corrigée par le regard acerbe de Virginie Despentes.

Le tome 1 est assez sombre dans l’ensemble, où l’on voit Vernon Subutex, ancien disquaire, sombrer peu à peu jusqu’à devenir S.D.F. Vernon Subutex - Virginie Despentes Le tome 2 (intelligemment précédé d’un index des personnages apparus dans le tome précédent) sera beaucoup plus lumineux, avec ce groupe d’amis qui se retrouvent autour de Vernon Subutex, au parc des Buttes Chaumont, pour discuter, écouter de la musique, fumer des joints et se la couler douce. Ça fait un peu penser aux années 70…

Reste le tome 3 ? il semblerait qu’il soit prévu, mais peu d’infos pour l’instant… Sans doute encore en cours d’écriture. En tout cas, j’ai beaucoup aimé ces deux romans, et je vais devoir revoir mon à-priori sur l’auteur.

Comme la musique est très présente dans cette histoire, il y a un site (sans publicité, créé par… un ancien disquaire !) qui a repris toutes les références musicales citées dans les deux tomes ; avec même une playlist à écouter en ligne !

Virginie Despentes, née en 1969 à Nancy, est est une écrivaine et réalisatrice française. Elle a connu le succès avec ses deux premiers romans, Baise-moi 1993) et Les chiennes savantes (1995).

Vacances de juin

Accéder à l'album Ça faisait longtemps que je n’avais publié un album photo ! En juin, j’ai passé des vacances dans le Sud, puis à Chamonix. L’occasion de voir les frangines, et de faire du sport (vtt, randonnées). Voilà donc les photos, certaines prises avec mon smartphone, et donc la qualité n’est pas forcément toujours présente !

Mais il y a de beaux paysages, ça c’est certain ! Au programme (entre autres) : escalade de la Sainte Victoire, randonnée à la mer de glace, VTT dans la vallée de Chamonix…

Soleil Hopi – Don C. Talayesva

Soleil Hopi - Don C. Talayesva En rangeant mes vieux bouquins, je suis tombé sur celui-ci, et j’ai eu envie de le relire. Je croyais en avoir de bons souvenirs, et avec une préface de Claude Lévi-Strauss, je me suis laissé tenter. En fait, mes souvenirs n’étaient pas très précis : je me souvenais de bonnes lectures avec des textes de chefs indiens, comme « Pieds nus sur la terre sacrée »…

Mais ce n’est pas le cas ici, il s’agit plutôt d’un ouvrage d’anthropologie, sous la forme de l’autobiographie d’un vieux chef indien Hopi ; il était d’ailleurs payé pour cela, sans doute à la page, ce qui laisse imaginer qu’il ait pu « broder » un peu…

Alors si vous voulez savoir à quelle occasion on jette de la farine de maïs au sol et dans quelle direction, cet ouvrage est parfait ! Les cérémonies sont racontées avec force détail, et à moins de vouloir étudier à fond la culture Hopi, la lecture de ces moments n’est pas vraiment passionnante, et représente une grande partie de l’ouvrage. J’ai failli abandonner…

Le début est cependant très intéressant, quand, tout jeune encore, Don Carlos Talayesva est envoyé à l’école des blancs, car c’est comme ça que cela se passe (colonisation) : il y apprend la langue, à lire et écrire, et bien sûr la religion chrétienne… Il y restera quelques années, puis choisira de revenir vivre selon sa culture propre (et à suivre la Voie du Soleil).

L’homme est apparemment d’une grande sincérité (et ne manque pas d’humour), il nous raconte beaucoup de choses sur la vie traditionnelle des indiens Hopi, l’éducation des enfants, etc… Leur monde est rempli de croyances, de rites à respecter, et est en fait très religieux. Il faut dire que la vie dans ces régions arides n’a rien d’évident, on invoque souvent la pluie et s’il y a sécheresse, c’est que l’on a fait quelque chose de mal. La description des rites d’initiation est donc assez ennuyeuse pour un simple lecteur, à l’exception de son voyage au pays des morts lors de son passage à l’âge adulte ! À vous faire dresser les cheveux sur la tête…

Si les rites ou cérémonies pour un oui pour un non réglementent beaucoup d’aspects de la vie, côté sexe, c’est par contre assez libre. Les jeunes hommes draguent et couchent à tout va, assez facilement… jusqu’au jour du mariage, où finalement ils ne seront qu’à peine plus fidèles ! Don C. Talayesva semble considérer qu’un homme a besoin de plusieurs femmes, mais il souhaite conserver la sienne…  Et quand sa femme lui demande des explications sur une rumeur d’infidélité, il inverse le problème en disant: « Dans ce cas, ça ne paye pas d’être honnête, car même si une femme trompe son mari, elle ne peut supporter que son mari en fasse autant« . CQFD, rien de nouveau sous le soleil (Hopi) ! 😉

Captain Fantastic – Matt Ross

Captain Fantastic - Matt RossC’est sur les conseils de Paul Jorion que je suis allé voir ce film (il en parlait sur son blog) ! J’en avais vaguement entendu parler, l’histoire d’un père qui élève ses enfants loin du monde développé, en pleine forêt. Ça m’avait fait penser à « Mosquito Coast », dont j’avais d’abord lu le roman de Paul Theroux (il y a bien longtemps !), puis vu le film de Peter Weir, avec Harrison Ford (1987).

Mais « Captain Fantastic » n’a rien à voir avec « Mosquito Coast » : ici, c’est plutôt le retour à notre société qui est traité, et de quelle manière ! Il y a des moments de franche rigolade, d’autres chargés d’émotion, et surtout beaucoup de questionnements qui nous viennent à l’esprit : on est parfois pris à nos propres contradictions, et amenés à changer d’avis au fur et à mesure des événements. C’est la grande force de ce film !

Peut-on vraiment totalement vivre à l’écart de la société ? Si la réponse apportée est probablement non (à tout le moins dans une forêt, surtout pour une famille avec des enfants), il peut être utile d’élever ces derniers avec d’autres valeurs que celles de la société consumériste contemporaine.

Le film démarre donc dans une forêt reculée du nord-ouest des États-Unis, où un père a élevé ses enfants, leur apprenant à vivre dans cet environnement à priori hostile. Mais il s’est aussi occupé de leur éducation, leur apprenant à développer leurs propres personnalités, à défendre leur point de vue par l’argumentation, et sans les brimer par des règles trop strictes.

Amenés à revenir dans le monde que nous connaissons tous, le contraste sera saisissant. La scène où ils se retrouvent tous autour de la table chez la sœur du père permet de mettre en évidence les différences d’éducation entre les enfants de chacun. Les deux enfants de la sœur font pâle figure à côté, plus intéressés par le dernier modèle de Nike, ou par leur console de jeu, que de la signification des amendements de la Constitution américaine…

Mais tout ne sera pas aussi simple, et d’autres problématiques vont apparaître. Et c’est là que nous, spectateurs, allons commencer à nous poser aussi des questions… Il n’y a rien de manichéen ici, et de chaque côté, il y a de l’amour, du bon sens… C’est tout l’intérêt de ce film.

Un film drôle, émouvant, qui vous fait réfléchir : un grand film donc, et qui a déjà obtenu deux prix : le Prix de la Mise en Scène à Un Certain Regard à Cannes et le Prix du Public au Festival Américain de Deauville.

Les faux-monnayeurs – André Gide

Les faux-monnayeurs - André Gide Encore un livre d’André Gide, mais un roman cette fois-ci. Je voulais voir ce que pouvait donner un roman de cet auteur, n’ayant lu que des récits de voyage : Voyage au Congo et Retour d’U.R.S.S.

D’abord, quel plaisir de lire un grand auteur ! On a beau dire, le style de grands écrivains (et sans doute plus de cette époque), c’est quelque chose ! Et assurément, André Gide en fait partie.

L’histoire est assez difficile à raconter, avec quatre personnages principaux : Olivier et Bernard, tous deux lycéens mais qui s’apprêtent à entrer dans la vie active, et deux écrivains homosexuels, l’oncle Édouard et Robert de Passavant… Ces derniers vont chercher à s’attirer les bonnes grâces deux autres…

Rien de graveleux pour autant, tout est exprimé sur le ton des sentiments ressentis, comme une amitié profonde entre deux êtres : on y parle de sentiments nobles en fait. Pas plus qu’une histoire de fausse monnaie ! Le titre fait référence à un élément mineur de l’histoire, où le petit frère d’Olivier, qui n’a pas froid aux yeux, trafique un peu.

Et bien d’autres intrigues viennent s’y mêler : les membres des familles d’Olivier et Bernard ont aussi leurs histoires et leurs problèmes, et il y a finalement pas mal de personnages qui participent à l’histoire. Cerise sur le gâteau, l’oncle Édouard écrit un roman s’intitulant « Les faux-monnayeurs » dans lequel il note les événement de sa vie, créant ainsi une mise en abîme dans la construction de l’histoire, parfaitement maîtrisée par André Gide.

On se laisse facilement porter par le style, la richesse de l’histoire, les sentiments des personnages. Ce que l’on peut appeler un bon roman.

André Gide (1869-1951) est un écrivain français, récipiendaire du prix Nobel de littérature en 1947. Issu d’une famille de la haute bourgeoisie protestante, il assume son homosexualité dès 1893, ce qui ne devait pas être évident. Plusieurs de ses œuvres sont sur ce thème ou au moins l’abordent ; avec Corydon qu’il choisit de publier sans crainte du scandale que cela allait inévitablement provoquer (on est en 1924, et l’homosexualité est encore considérée comme une perversion), il exprimera sa vision (le  sous-titre est « Quatre dialogues socratiques »). Les faux-monnayeurs, publié en 1925, a été reconnu comme précurseur de nouveaux styles littéraires, comme le nouveau roman.

Mercenaire – Sacha Wolff

Mercenaire - Sacha WolffBonne surprise que ce film, tourné avec des acteurs amateurs. Le rôle principal, celui de Soame, est excellent, avec sa masse athlétique impressionnante, et dont pourtant une douceur énorme se dégage.

Soame, à 19 ans, quitte donc l’île de Wallis (Polynésie française) pour aller tenter sa chance dans la France du rugby, suite aux belles promesses d’un agent peu scrupuleux, et contre l’avis de son père. Ce dernier, après l’avoir battu jusqu’au sang pour le faire changer d’avis, finit par le renier.

Arrivé en France, à peine sorti de l’aéroport, le club qui devait l’accueillir le rejette car l’agent a nettement menti sur ses mensurations (il ne pèse que 110 kgs !). Commence alors un parcours difficile pour le jeune homme, qui va retrouver une place dans un petit club, mais se trouver confronté à pas mal de problèmes…

Restant fidèle à ses valeurs, il va à travers eux devenir un homme. Il retournera même à Wallis pour tenter de se réconcilier avec son père…

Mais ce qui m’a le plus surpris dans ce film, c’est la description du monde du rugby, hélas très réaliste. Le portrait dressé est assez désespérant : il y a une énorme violence sociale dans la façon dont un petit club (niveau Fédérale 3) recrute ainsi un jeune polynésien, le paie une misère, lui demande de se doper, et où sa pseudo intégration ne tient finalement qu’à ses résultats sportifs. Voilà ce que dit Sacha Wolff à propos du dopage :

Quand on voit les coups et traumatismes qu’encaisse un joueur de rugby par match, comment peut-on imaginer qu’il puisse tenir sur une saison sans être un peu aidé médicalement ? Le moralisme autour du dopage est absurde et j’avais envie d’en faire quelque chose de presque comique. Le dopage n’est pas pour autant mon sujet, je n’ai pas voulu enquêter ou révéler quoi que ce soit sur cette question, mon rôle n’est pas de faire du journalisme d’investigation. Le dopage fait juste partie de l’univers dans lequel Soane vit.

Retour de l’U.R.S.S. – André Gide

Retour de l'U.R.S.S. - André Gide

Voilà un petit moment que j’avais dans l’idée de lire ce livre. D’abord parce que, publié en 1936, il alerte déjà sur les dérives du système communiste. Violemment critiqué lors de sa publication par toute une partie des intellectuels toujours séduits par le communisme, André Gide publiera un an plus tard « Les retouches… » afin de leur répondre. Ce sont ces deux textes (relativement brefs) qui sont réunis dans ce livre.

La deuxième raison, c’est la qualité des écrits d’André Gide. Je l’ai découvert en lisant Voyage au Congo : récit de voyage magnifiquement écrit, et brûlot politique dans sa dénonciation du colonialisme. D’ailleurs, là aussi, il se fera tailler des croupières par la droite française, qui voit là une attaque contre les intérêts de la nation.

Un personnage très cultivé, voyageur, qui écrit bien, et qui n’hésite pas à dénoncer les abus du pouvoir quand il s’y trouve confronté… je me dis qu’un tel auteur mérite forcément d’être lu, et que l’on a peu de risque d’être déçu.

Dans le premier texte, on sent chez André Gide une certaine admiration pour ce qu’il découvre, et notamment les parcs de la culture, endroits où la jeunesse se retrouve après la journée pour y exercer toutes sortes d’activités (sportives, culturelles)  dans une sorte de ferveur joyeuse. Mais très vite, il se rend compte de l’impossibilité de critiquer le régime ; en particulier de l’effet désastreux sur les artistes, qui doivent se conformer à la rhétorique, leur art devant coller aux préceptes du gouvernement.

Les remarques concernent essentiellement les conséquences sur les artistes, mais André Gide étant passionné par l’art, c’est logique qu’il s’intéresse de près à ce sujet, dans ce nouveau contexte.

Dans la deuxième partie, Gide développe les effets du régime : pauvreté, sous-alimentation, analphabétisme, désindividualisation, dénonciations (par les enfants), déportations… S’il y a bien une dictature, ce n’est déjà plus celle du prolétariat, mais bien celle d’un despote et de son parti communiste tout puissant. Malheur à celui qui ose s’en écarter.

En URSS, il est admis d’avance et une fois pour toutes que, sur tout et n’importe quoi, il ne faut et ne saurait y avoir plus d’une opinion.

C’est très bien écrit, ses remarques sont pleines de bon sens, et le tout empreint d’une grande franchise. Difficile, par la suite, de dire « on ne savait pas ! ». Ils seront pourtant nombreux à le vilipender, et parmi eux, Simone de Beauvoir, qui nous dit dans La force de l’âge (que j’ai lu peu de temps avant) :

Le seul pays capable et sincèrement désireux de barrer la route au fascisme, c’était l’U.R.S.S. Et voilà que nous ne comprenions plus rien à ce qui se passait là-bas. Gide avait été trop prompt à s’engouer, trop prompt à se dédire, pour que nous prenions au sérieux le Retour d’U.R.S.S. qu’il s’était hâté de publier en revenant de Russie et qui avait fait grand bruit.

C’est un peu facile d’écrire ça, cela ressemble plus à de l’auto-justification pour éviter de dire qu’ils s’étaient tout simplement trompés (elle et Sartre).

André Gide (1869-1951) est un écrivain français, récipiendaire du prix Nobel de littérature en 1947. Issu d’une famille de la haute bourgeoisie protestante, il assume son homosexualité dès 1893, ce qui ne devait pas être évident.

Soy Nero – Rafi Pitts

Soy Nero - Rafi Pitts Film que je suis allé voir un peu au hasard, sachant que cela parlait d’immigration mexicaine aux États-Unis, et du problème de la fameuse « Green card », celle qui donne le droit de travailler, et donc de sortir de la clandestinité et obtenir à terme la nationalité américaine.

Nero a dix-neuf ans, est né aux États-Unis mais s’est fait déporté par les services d’immigration au Mexique. Il décide de retourner clandestinement dans le pays de ses rêves pour y retrouver son frère à Los Angeles. Mais ce dernier ne peut guère l’aider, ayant lui-même de faux papiers, même s’il a un travail. Nero va alors s’engager dans l’armée américaine, ultime moyen pour pouvoir espérer la nationalité américaine (les « green card soldiers »).

Il se retrouve très vite quelque part dans le désert (Afghanistan ? Irak ?), à contrôler un checkpoint avec quelques autres soldats. Suite à une attaque à la voiture piégée, Nero va se retrouver seul à errer dans le désert, et finir par retrouver une patrouille américaine… qui va lui demander de prouver son identité, bouclant ainsi la fable absurde de sa quête.

Malgré quelques longueurs, le film nous fait partager l’impossible quête d’une identité pour Nero, en décrivant au passage une Amérique qui ne se comprend plus elle-même. C’est très bien réalisé, le récit est superbement construit, et l’acteur Johnny Ortiz excellent.

À propos des « green card soldiers » : Ils existent depuis la guerre du Vietnam. Il s’agit pour ces derniers d’un moyen d’obtenir la citoyenneté américaine après deux ans de service. Depuis le 11 septembre et le « Patriot Act » de George Bush, beaucoup de migrants illégaux ont ainsi rejoint l’armée américaine pour devenir « green card soldier » et éviter l’expulsion. Rafi Pitts développe :

Ils ne devenaient américains qu’à leur retour du front ou à leur mort. Ils se sentaient comme des soldats apatrides et en voulaient beaucoup à Bush qui ne les reconnaissait pas comme pleinement américains, tandis que les Mexicains ne les considéraient déjà plus comme étant des leurs. Lorsqu’ils obtiennent enfin leur naturalisation, ces citoyens ne sont pas tout à fait à l’abri pour autant. Il suffit d’un minuscule prétexte pour bannir les soldats qui ont été naturalisés de cette manière. Ils ont servi l’armée pendant trois ans et pour une altercation ou une histoire de cannabis, ils sont expulsés.

Lectures, Ubuntu, Smartphone, Cinéma, entre autres…