Moon Palace – Paul Auster

Paul Auster nous a quitté il y a peu, j’ai eu envie de lire un de ses romans que je n’avais pas déjà lu (il y a longtemps), comme « La trilogie New-Yorkaise », ou « La musique du hasard », parmi ceux dont je me souviens, ou comme « Léviathan » et « Le voyage d’Anna Blume , dont je n’ai gardé aucun souvenir (!). J’ai choisi « Moon Palace », bien noté si j’en crois cette liste puisqu’il en arrive en tête.

Dans mes souvenirs, Paul Auster est certainement un conteur-né, qui sait vous emmener avec brio dans des histoires toujours surprenantes, mais qui a du mal à finir ses histoires, à retomber sur ses pieds. Dans ce roman, ce n’est pas le cas, quand Marco Stanley Fogg atteint la côte du Pacifique après un long parcours, il est effectivement arrivé à la fin d’un cycle, prêt à débuter une nouvelle vie, et l’histoire peut s’arrêter là.

Auparavant, il nous aura raconté son histoire peu banale, fils d’un père inconnu et d’une mère disparue quand il avait onze ans, et élevé par un oncle un peu bohème. devient un étudiant fauché, ayant beaucoup lu, solitaire et rêveur, un intellectuel qui se veut original mais qui est surtout pommé, et qui finit par se clochardiser dans Central Park. Tout prêt de mourir de faim et sauvé in extremis par un ami et une jeune fille dont il tombera éperdument amoureux, il doit alors se présenter pour la conscription, et se confie ainsi au psy de l’armée :

Nos vies sont déterminées par de multiples contingences, déclarai-je, en essayant d’être aussi succinct que possible, et nous luttons chaque jour contre ces chocs, ces accidents, afin de conserver notre équilibre. Il y a deux ans, pour des raisons philosophiques et personnelles, j’ai décidé de renoncer à cette lutte. Ce n’était pas par envie de me tuer – n’allez pas croire ça – mais parce qu’il me semblait que si je m’abandonnais au chaos de l’univers, l’univers me révélerait peut-être en dernier ressort une harmonie secrète, une forme, un plan, qui m’aideraient à pénétrer en moi-même. La condition était d’accepter les choses telles qu’elles se présentaient, de se laisser flotter dans le courant de l’univers. Je ne prétends pas y avoir très bien réussi. En fait, j’ai échoué lamentablement. Mais l’échec n’entache pas la sincérité de la tentative. Même si j’ai failli en mourir, je crois que cela m’a rendu meilleur.

Cela résume assez bien le début du roman et le personnage ! (évidemment, il sera réformé, ce qui était en partie le but du discours… ). Fogg va alors se retrouver au service d’un vieillard encore plus original que lui, coincé sur sa chaise roulante, et qui va lui raconter sa vie pour écrire ses mémoires avant de mourir. L’occasion pour l’auteur de nous emmener dans une nouvelle histoire peu banale et passionnante… Puis Fogg se retrouvera seul, face à lui-même, et se dirigera vers l’Ouest pour trouver son propre chemin.

Un bon roman, plaisant à lire, Fogg reste toujours d’une honnêteté totale et une personnalité attachante à travers toutes ses aventures. Avec son côté poète, il s’attache aux coïncidences que la vie procure, comme ses prénoms (Marco comme Marco Polo et Stanley comme le journaliste qui retrouva Livingstone) qui le prédisposent donc aux voyages. La lune revient aussi plusieurs fois dans sa vie, et d’autre coïncidences avec lesquelles l’auteur s’amuse pour le plus grand bonheur du lecteur.

Paul Auster (1947-2024) est un romancier, scénariste et réalisateur américain. Côté cinéma, j’avais beaucoup aimé Smoke et Brooklyn Boogie, deux films auxquels Paul Auster (scénriste des deux et réalisateur du second), avec un excellent Harvey Keitel dans le rôle du patron du Brooklyn Cigar Company, un débit de tabac de Brooklyn, où défilent des personnages hauts en couleur, autant de tranches de vie dont on se délecte.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *