Au cœur des Himalayas – Alexandra David-Néel

Au cœur des Himalayas - Alexandra David-Néel Ce livre, publié en 1949, retrace la visite d’Alexandra David-Néel au Népal en 1912. C’est donc au tout début de sa vie d’aventureuse, bien avant qu’elle ne se rende au Tibet… À cette époque, elle vient d’arriver en Inde : mariée, elle est partie en promettant à son mari de revenir dans dix-huit mois… Elle ne reviendra que quatorze ans plus tard !

C’est donc le récit de son voyage au Népal qu’elle nous raconte : le pays est encore interdit aux étrangers, mais elle bénéficie d’une autorisation spéciale dont elle préfère ne pas dévoiler la source (sans doute un dignitaire anglais qui connaît un maharadja…). Elle va ensuite pouvoir visiter Katmandou et les anciennes capitales du royaume, Patan et Bhaktapur, puis la région du Téraï, la plaine qui jouxte l’Inde. Elle se rendra également sur le lieu de naissance du Bouddha.

Tout cela en chaise à porteurs, avec serviteurs, gardes, etc… Elle s’en défend et préférerai plus de liberté dans ses déplacements, mais son voyage est « sous contrôle ». La chaise à porteurs, les serviteurs, le cuisinier, ne semblent pas la déranger plus que ça par contre.

Elle est très érudite sur la mythologie, l’histoire du royaume, les rites hindouistes et leurs sacrifices, les sectes, etc… Et n’hésite pas à nous faire partager ses connaissances, au fil de son récit et de ses rencontres. On la sent tout de même un peu pédante parfois, condescendante envers les érudits locaux qu’elle rencontre ! Mieux vaut être un mystique ou un religieux que prétendre être un B.A. (bachelor ès Arts, l’équivalent de notre baccalauréat) à ses yeux !!

Mais l’ensemble est tout de même intéressant, cela reste un beau récit de voyage. Le point d’orgue étant sa rencontre avec un tigre alors qu’elle est en train de méditer, seule dans la jungle. Elle garde son contrôle et tâche désespérément de continuer sa méditation… et le tigre finit par s’en aller.

Chose amusante, j’ai retrouvé la même légende que celle racontée dans Le chapeau de Vermeer, ou comment les espagnols obtiennent un bout de territoire de Manille pour y ouvrir un comptoir. Timothy Brook disait que c’était un stratagème emprunté à l’Énéide… Ici, c’est la fille d’un Dieu, Kang Tchoungma qui utilise le même stratagème :

Elle était pieuse et décida de construire un stûpa en l’honneur de Bouddha. Pour ce faire, elle alla trouver le roi et le pria de lui donner un terrain sur lequel le stûpa pourrait être bâti. Mais bien que son intention fût d’ériger un grand stûpa elle ne demanda au roi que l’étendue d’un terrain qu’elle pourrait couvrir avec une peau de bœuf. Le roi ayant acquiescé à sa requête, la femme découpa une peau de bœuf en très fines lanières et en entoura l’espace qui est aujourd’hui occupé par le stûpa.

Décidément, les légendes ont la vie dure, mais manquent parfois de variété ! Pour info, il s’agissait du stûpa de Bodnath, l’un des plus grands du monde. Ceci dit, les espagnols avaient obtenu une longueur d’une douzaine de kilomètres… Beaucoup plus forts que Kang Tchoungma ! 😉

Pour finir, une autre anecdote qui m’a bien plu, à propos des Indiens et des Anglais (et des Blancs !) :

C’est sur les bords du Gange que j’ai entendu cette déclaration singulière : « Les Anglais nous méprisent et nous le savons. Mais nous nous méprisons les Anglais et ils ne le savent pas. C’est un avantage que nous avons sur eux.
L’Indien qui parlait ainsi nommait les Anglais parce qu’ils étaient les étrangers les plus proches de lui, mais tous les Blancs pouvaient être inclus dans sa déclaration.

Alexandra David-Néel (1868-1969) est une orientaliste, tibétologue, chanteuse d’opéra et féministe, journaliste et anarchiste, écrivaine et exploratrice, franc-maçonne et bouddhiste de nationalités française et belge ! Rien que ça, c’est ce que proclame Wikipedia en tout cas… De ce petit récit de voyage, difficile de la croire anarchiste, ne serait-ce que par son mode de voyage, mais aussi par ses remarques sur les personnes qu’elle croise. Il semble qu’elle s’y soit surtout intéressée dans jeunesse, toujours selon Wikipedia : à ce titre, cela fait certainement beaucoup d’anarchistes sur la planète.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *