Les pionniers – Ernest Haycox

Je ne sais plus trop où j’ai entendu parler de ce livre, mais quand j’ai vu que la série « L’Ouest, le vrai » d’Actes Sud était dirigée par Bertrand Tavernier, je n’ai guère hésité, me souvenant de ses préfaces très documentée pour l’excellente trilogie The Big Sky.

Retour à la littérature « Western » donc, et l’histoire commence fort avec des colons franchissant au péril de leurs vies la dernière chaîne montagneuse avant de rejoindre l’Oregon, la terre promise. Les conditions météorologiques sont dantesques, ce que ces hommes et femmes endurent est terrible, et la mort jamais très loin. La vie décrite de ces paysans devenus colons pour vivre leur rêve est vraiment très dure, particulièrement la première année (après un voyage déjà très difficile) où il faudra attendre la première récolte pour espérer un peu de répit.

Rice Burnett fait partie de ces colons, et est le plus expérimenté d’entre eux grâce à une expérience de trappeur aux sources du Missouri. Il est au centre du récit, et souhaite s’intégrer à ce groupe et passer à une vie sédentaire. Célibataire, il hésite entre deux femmes aux caractères très différents, l’une provocante et l’autre tout en retenue, et c’est l’un des points que l’auteur va approfondir. D’autres personnages émaillent le récit, comme Cal Lockyear habité par la violence, ou Hawn marié à une indienne et ostracisé. Tous les personnages sont très bien décrits, et donnent de la profondeur au récit.

Car si l’auteur s’attache à décrire la vraie histoire de ces pionniers, il se penche aussi sur les rapports humains, ceux des individus et du groupe bien sûr mais aussi ceux entre hommes et femmes, et j’ai été surpris par ce qu’il décrit : une jeune femme a largement son mot à dire pour le choix de son mari, et les hommes sont très respectueux des usages en cours dans cette société très pudibonde. Si on parle souvent à mots couverts, les choses sont dites d’une façon ou d’une autre. Cela donne des dialogues parfois surprenants, assez elliptiques, dont l’auteur semble se délecter. Il accorde aussi une grande attention aux attitudes des intervenants (un plissement des lèvres, un regard détourné, une pâleur subite, etc…) pour donner une clef supplémentaire de compréhension à la scène. Tout cela apporte beaucoup d’intérêt à l’histoire de cette communauté.

J’ai aimé ce roman, au style assez simple et direct. Les hommes et les femmes sont décrits avec empathie et profondeur, la nature est omniprésente par sa beauté et par sa puissance. La description de l’époque et de l’aventure que vivaient ces gens est admirablement rendue.

Ernest Haycox (1899-1950) est un écrivain américain, prolifique auteur de westerns. Les pionniers (The Earthbreakers) est son dernier roman, publié à titre posthume (1952), et sans doute son plus abouti. Parmi ses admirateurs, on comptait Gertrude Stein et Ernest Hemingway.

Huit de ses œuvres ont été portées à l’écran, tels La Chevauchée fantastique (Stagecoach, 1939), Le Passage du canyon (Canyon Passage, 1946) et Les clairons sonnent la charge (Bugles in the Afternoon, 1952). En 2005, le prestigieux jury des Western Writers comptait Haycox parmi les vingt-quatre meilleurs auteurs de l’Ouest du XXe siècle.

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