Hadopi 2, le retour

dans le mur J’avais intitulé un article récent « Hadopi c’est fini« . C’était aller un peu vite, et sous-estimer la ténacité de notre président de la République : « j’irai jusqu’au bout. » a-t-il dit lors du discours de Versailles, le 22 juin dernier. Voici donc HADOPI 2, qui doit bien sûr refaire tout le parcours législatif ayant amené la première version au panier.

Or La Tribune a annoncé que le Conseil d’État avait relevé des risques d’anti-constitutionnalité dans cette nouvelle mouture du texte. Et que le gouvernement n’en avait pas tenu compte… euphémisme désignant le président de la République : tenace donc, et obstiné.

Pour rappel, et concernant HADOPI 1, le Conseil Constitutionnel avait estimé que la possibilité de supprimer l’accès à internet constituait une atteinte à la liberté d’information, doublée d’une atteinte à la présomption d’innocence.
Alors de quoi s’agit-il cette fois-ci ?

HADOPI 2 et sa Commision de Protection des Droits n’ont plus aucun pouvoir de sanction, tout passe par le juge. Et comme la justice est débordée, qu’aucun budget n’est prévu, on utilisera l’ordonance pénale. C’est le même système que celui mis en place pour les contraventions : le juge se voir confier un dossier, décide d’une sanction, le condamné ayant alors un délai pour contester la décision. L’intérêt majeur étant le côté automatique (et peu coûteux) de la chose.

Pour bien comprendre le système, je vous recommande de lire l’article du Journal d’un avocat : c’est clair, et parfaitement expliqué.

L’ordonance pénale, c’est la technocratie appliquée à la justice.

Le problème, c’est que le dossier doit contenir les preuves, pour que le juge puisse juger. Si c’est assez simple pour une contravention (radar), il en va tout autrement pour une contrefaçon. Une adresse IP ne constitue pas une preuve, ni un nom de fichier… Le juge risquerait donc fort de renvoyer le dossier pour manque de preuve, ou de demander au parquet de faire une enquête, ce qui ferait perdre tout l’aspect simplificateur du projet.
Mais ce n’est pas le seul problème, et l’article détaille d’autres aspects de cette approche posant également problème. Avec un certain humour parfois :

…déjà qu’une adresse IP ne permet pas d’identifier l’utilisateur de l’ordinateur, je doute qu’elle permette de connaître sa personnalité et ses ressources (encore que : le pirate qui télécharge l’intégrale de Marilyn Manson est probablement une jeune fille mineure aux cheveux et ongles noirs, qui aime la mort et les poneys et n’a pas assez d’argent de poche).

Bref, HADOPI 2 a les mêmes défauts que sa première version : atteinte à la présomption d’innocence. Les utilisateurs dénoncés sont toujours présumés coupables. Sans aucune preuve. La conclusion de l’avocat est sans appel :

Le problème est que l’idée centrale du projet HADOPI est justement de contourner tous ces principes constitutionnels, qui ne sont, pour le Gouvernement, que des obstacles.

Tenace et obstiné, soit. Mais peu respectueux des principes constitutionnels, c’est inquiétant pour la République.

Vous pouvez consulter le site La Quadrature du Net pour vous tenir informé.

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