Martin Eden – Jack London

C’est le récit le plus autobiographique de Jack London, l’histoire d’un jeune homme pauvre mais qui a déjà roulé sa bosse, et qui tombe amoureux de Ruth, une jeune fille de bonne famille. Doué d’une force de caractère et de travail peu commune, Martin Eden va devoir tout apprendre : parler correctement, se cultiver, lire et encore lire ; il est plein d’une énergie folle et vite persuadé de réussir comme écrivain, pour à terme mériter l’amour de Ruth.

Le récit jusqu’alors assez romanesque bascule dans autre chose et devient passionnant : Martin se révèle un intellectuel de haut niveau, et se rend compte que derrière cette bourgeoisie idéalisée, qui a pu recevoir une bonne éducation, se cache un conventionnalisme béat sans aucune idée réelle de ce qu’est la culture. Seules les conventions comptent, et d’ailleurs entre-temps, Ruth l’a rejeté puisqu’il refuse de chercher une situation stable. Lui est plutôt attiré par les théories évolutionnistes, et par les théories de Nietzsche qui prêche l’individualisme.

Obligé un temps de travailler comme blanchisseur pour gagner sa vie, la description en est ahurissante : un travail harassant du matin jusqu’à tard le soir, qui l’abrutit au sens premier du mot : il est alors incapable de lire quoique ce soit, il devient une véritable bête de somme… Et finit par commencer à boire le week-end, seule façon de s’offrir l’illusion d’échapper quelques heures à ce cauchemar. Moment fort de l’histoire, et qui montre bien le sort des travailleurs de l’époque, et l’incapacité de se sortir de ce cercle infernal.

Le succès va finir par arriver, au moment où Martin a décidé de ne plus écrire. Sa vision du monde change alors à nouveau, il devient célèbre (en envoyant aux éditeurs tous ses écrits précédemment rejetés), mais il est revenu de tout et ne croit plus en rien. La fin du récit est d’une grande force, et il n’y aura pas de « happy end ».

Un très bon roman, qui démarre doucement et termine très fort !

Jack London (1876-1916) est un écrivain américain dont les thèmes de prédilection sont l’aventure et la nature sauvage. Il a connu le succès après des années de pauvreté, de vagabondage et d’aventures. Il ne faut le réduire à un écrivain pour adolescents avec ses succès « L’Appel de la forêt » ou « Croc-Blanc », son œuvre est beaucoup plus vaste et aussi politiquement engagée. D’ailleurs Jack London prétend que Martin Eden est plus une attaque contre Nietzsche et son individualisme qu’un roman autobiographique !

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