Voyage dans la Sarthe ou dans la Drôme ?

l'article du Canard Le Canard s’en fait souvent l’écho, nos plus hauts dirigeants font un large usage des transports aériens, aux frais de la République cela va de soi. Rien d’anormal dans le principe, mais quand on y regarde de plus près, on est en droit de se poser des questions.

Une façon d’illustrer le décalage entre la situation économique de nos concitoyens et le monde dans lequel vivent nos politiques, ainsi que des usages de la République dans notre beau pays, si prompt à donner des leçons de démocratie.

La Sarthe

Le premier ministre Fillon part en week-end dans la Sarthe en Falcon 900, pendant que son chauffeur prend la route avec la voiture blindée pour l’accueillir sur place, coût de la plaisanterie : 20 000 €.

Le trajet serait plus rapide en TGV, mais l’argument sécurité est avancé : les mesures (déminage du train) perturberaient les voyageurs. Même avec la voiture, pratiquement aussi rapide que le Falcon, ce serait jouable… mais là encore, le problème avancé est la sécurité. Le premier ministre invoque « les règles d’usage de la république »… J’oubliais, l’hélicoptère (utilisé par Mitterrand pour ses week-ends dans les Landes) est jugé trop bruyant.

Rappelons qu’Angela Merkel conduit sa propre voiture pour les 100 kilomètres qui séparent Berlin de sa résidence secondaire. La semaine, elle fait ses courses au supermarché et fait la queue comme tout le monde, puis paie avec des espèces tirées de son porte-monnaie. David Cameron quant à lui prend le plus souvent des avions de ligne ou le train.

La Drôme

Pan sur le bec ! Le président Sarkozy s’est quant à lui offert un Airbus A330 personnel. Le coût a été estimé à 170 millions d’euros, et son heure de vol à 20 000 €. On peut comprendre que pour les déplacements internationaux, le prestige de la France (pays riche rappelons-le) soit à ce prix.

Mais là où l’on atteint les sommets (aériens), c’est quand notre président prend son Airbus pour aller dans la Drôme le 03 mars dernier 2009 (voir la correction publiée par le Canard ci contre), sous le prétexte de rencontrer la France profonde.

Le préfet, terrifié, réquisitionna 1265 gendarmes : c’est vrai qu’il peut se faire virer au moindre incident, celui de la Manche l’a appris à ses dépends. Et comme l’aérodrome de Chabeuil est de taille modeste, il a aussi fallu acheminer de Lyon une rampe d’accès et divers matériels en transport exceptionnel, sinon le président n’aurait pu descendre de l’avion !

Ce n’est pas tout : la voie rapide Valence-Romans a été coupée dans les deux sens pendant une demi-heure pour permettre au cortège présidentiel de rouler à fond la caisse. Soixante automobilistes qui avaient eu la mauvaise idée de se garer sur le passage du convoi retrouveront leur véhicule à la fourrière ! sécurité oblige… Et la sécurité, c’est primordial : un hélicoptère Puma était aussi présent sur les lieux (accompagné d’une Gazelle en appui) pour exfiltrer le président en cas de problème (des manifestants qui auraient réussi à forcer les barrières des 1265 gendarmes sans doute !).

Après une visite au pas de course (une école et une salle polyvalente, on mesure l’importance stratégique du déplacement), le président en a profité pour trinquer avec 2000 militants UMP du département gracieusement invités au vin d’honneur. Puis retour à Paris par les mêmes moyens. La durée totale de l’opération, de porte (de l’Élysée) à porte (de l’Élysée) aura été de 3 heures en tout et pour tout.

Je résume donc cette situation très inquiétante : la route est dangereuse, un train peut cacher une bombe, l’hélicoptère est trop bruyant, et les aérodromes de province mal équipés. Et voilà que les préfets deviennent paranos, et la France profonde remplie de dangereux individus toujours prêts à vilipender notre président alors qu’il vient gentiment à leur rencontre… bandes d’ingrats ! Heureusement, trois heures, c’est vite passé ! Mais à quel prix ?

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