Archives de catégorie : Cinéma

Paranoid Park – Gus Van Sant

Paranoid Park C’était il y a déjà quelques semaines, j’ai regardé Paranoid Park sur Arte. Je ne savais pas trop à quoi m’attendre, mais je faisais confiance à Gus Van Sant, réalisateur de Good Will Hunting que j’avais beaucoup apprécié, ainsi qu’Elephant, toutefois dans un registre plus particulier (le drame du lycée de Columbine).

C’est donc l’histoire d’Alex, un adolescent de Portland (Californie), fan de skate qui se rend souvent à «Paranoid Park», LE terrain de glisse où se retrouvent les meilleurs skaters du coin… encore faut-il oser affronter le regard des autres : ne dit-on pas que personne n’est jamais assez mûr pour «Paranoid Park» ? … Le corps d’un homme est retrouvé non loin de là, coupé en deux par un train, et la police enquête. Est-ce un accident ? Que s’est-il passé ? Quelqu’un a-t-il vu quelque chose ?

Paranoid Park Passé les premières minutes, on se laisse emporter par la narration toute en subtilité et pleine de poésie de Gus Van Sant. Alex va être interrogé par la police comme tous les skaters du lycée. L’interrogatoire du flic est révélateur : il tente désespérément de la jouer « pote » avec Alex, du genre « moi aussi j’ai été jeune »… pitoyable ! on comprend vite dans quelle société vit Alex, et le peu de place qu’il y trouve. Il n’exprime rien, totalement hermétique au monde des adultes, mais gardant une façade amicale, cool. Les quelques scènes où l’on aperçoit sa mère ne font que renforcer ce sentiment et c’est encore une fois remarquablement filmé : la mère apparait en arrière-plan, incomplète, ou alors ce n’est qu’une ombre ou même une voix. Les dialogues font le reste. Tout est dit en quelques plans. Les scènes de skate sont elles filmées comme un espace de liberté, presque onirique.

Cerise sur le gâteau, quel ne fût pas mon plaisir de découvrir que deux morceaux d’Elliott Smith font partie de la bande son : Angeles et The White Lady Loves You More. Gus Van Sant est décidément un fan, son film « Good Will Hunting » comportait déjà plusieurs titres de ce grand song-writer américain que fût Elliott Smith. Je ne résiste pas au plaisir de vous proposer le second morceau :

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Ce film est rediffusé samedi soir 29 mai sur Arte, à 1h10 : si vous êtes de sortie, à vos magnétoscopes !

No country for old men

No country for old men, l'affiche Les frères Coen m’ont bien souvent fait passer de bons moments. Le premier film que j’ai vu devait être Blood simple (Sang pour sang), puis Fargo, qui repassait la semaine dernière sur France 4 et que j’ai revu avec grand plaisir.

Ce que j’aime, ce sont ces histoires un peu décalées qui finissent systématiquement par foirer, pour une raison ou pour une autre, et bien souvent par la bêtise, les acteurs du drame se trouvant vite  dépassés par la situation dans laquelle ils se sont (retrouvés pour certains) embarqués. Petits escrocs minables, voyoux dotés de peu de cervelle… Et la police, sans génie, finit par les coincer.

En revoyant Fargo, je m’amusais de la pauvreté des dialogues entre les gens du coin, de la lenteur des phrasés, terriblement ennuyeux mais tellement révélateurs d’un mode de vie : on parle peu, et de choses sans importance, et comme ça on évite les ennuis. La sagesse de la campagne…

Mais avec No country for old men, un cap est passé. Le voyou est un tueur psychotique, intelligent et dur au mal (c’est le moins que l’on puisse dire). Pour le traquer, un trafiquant de drogue fait même appel à un tueur à gages, lui ausssi plutôt inquiétant, et très sûr de lui…trop, car le premier aura facilement raison du second. Car malheur à tous ceux qui croisent sa route, il les tuera systématiquement : « Vous m’avez vu ? » répond-il laconiquement lorsqu’une victime lui demande s’il va la tuer.

Le Texas Ranger qui enquête, interprété par Tommy Lee Jones, en a pourtant vu au long de sa carrière. Mais là… il préfèrera abandonner l’enquête et prendre sa retraite, manifestement dépassé  ! Le tueur quant à lui continuera vraisemblablement son chemin.

J’ai trouvé ce film trop violent, comme souvent avec les films américains. Une violence gratuite, folle, qui n’a pas de sens… Et bizarrement, l’épilogue apporte un sens à tout cela : la retraite du flic sonne le glas d’une époque, celle où le flic avait encore une chance d’arrêter le coupable.

Pour bien faire, les frères Coen devraient arrêter de faire ce genre de film, histoire d’enfoncer le clou : cette société génère des individus tellement dangereux qu’on ne peut plus traiter ce genre de sujet à la rigolade. Et peut-être revenir à des sujets comme The big Lebowski, tout aussi décalé mais encore plus drôle.

Etreintes brisées – Pablo Almodovar

etreintes brisées, l'affiche Je suis allé voir le dernier film de Pablo Almodovar : Étreintes brisées, un peu par hasard puisque je prévoyais de voir Millenium !! Comme cela arrive parfois quand on regarde les horaires des films le mardi et que l’on y va le mercredi, il se peut que le programme ait changé… Ce fût le cas, et je me suis donc rabattu sur celui-ci, n’ayant jamais été déçu par les films de Pablo.

Et bien, ce fût le cas cette fois-ci. On reconnait bien la patte de Pablo Almodovar, un peu de son univers, de sa manière de raconter les histoires au gré de retours vers le passé, apportant peu à peu un éclairage souvent innatendu au récit. Et certes Pénélope Cruz est magnifique.

Mais l’histoire est finalement assez classique, voire peu intéressante, et vite décryptée. L’histoire d’un cinéaste… quand les cinéastes commencent à raconter des histoires de cinéastes, cela sent plutôt le manque d’inspiration… L’univers décrit est finalement très conventionnel, et on ne retrouve pas le côté décalé et très drôle des films précédents d’Almodovar.

Bon divertissement, sans plus. Et donc un peu déçu, surtout par rapport à ce que l’on était habitué à voir de ce cinéaste.

Bienvenue chez les Ch’tis

ma scène préférée Le week-end dernier, je suis allé voir Bienvenue chez les Ch’tis, embarqué au Gaumont de Rennes par les Vallées de Chateaugiron (enfin surtout par les enfants, qui auraient fait une scène si nous n’y étions pas allé). Après une bonne galette à la crêperie des Quais en face le ciné (bien épaisse, et pas de la dentelle comme on voit trop souvent), nous voilà fin prêts.

C’est finalement une très bonne comédie, drôle, et plutôt bien faite (Kad Merad y est excellent). Rien de trop lourd, on joue sur les clichés bien sûr, mais sur un ton léger et le propos est clair : on est là pour rigoler. Et on se marre. J’ai particulièrement aimé la scène dans le village de mineurs reconstitué. Un gros délire, c’est soudain du Zola, avec toute la misère du monde. Hilarant. « Les mines sont fermées, mais on y habite toujours… »..

On peut attendre de le voir un soir à la télé, il a eu assez d’entrées comme ça. Mais on passera un bon moment en y allant ! Le journaliste et historien Antoine de Baecque a déclaré :« le succès de Bienvenue chez les Ch’tis entre exactement dans le cadre culturel de Sarkozy ». Si on peut se poser des questions sur la politique culturelle de notre président, ne boudons pas notre plaisir pour autant.

Into the Wild – Sean Penn

intothewild.png Tirée d’un roman : Voyage au bout de la solitude, de John Krakauer, c’est l’histoire vraie de Christopher McCandless, un jeune américain qui, en 1990, à peine diplomé, abandonne tout et « prend la route » seul. Il refuse la société matérialiste, et quitte sa famille sans prévenir. Il va traverser l’Amérique, faire des rencontres, ne jamais s’attacher, puis prendre la direction de l’Alaska, pour se retrouver seul en pleine nature sauvage. La même quête que celle de Jack London, ou de Thoreau.

Si le film est bon (et long, 2h30), je suis resté un peu sur ma faim, les scènes sur la famille McCandless prennent trop de place sur l’aventure elle même. Certes, c’est important pour comprendre pourquoi il abandonne tout comme ça (et on a quand même vite compris), mais c’est forcément au détriment d’autres anecdotes survenues pendant son périple, qui auraient été autrement plus intéressantes. Sinon le rythme est un peu lent (un peu comme dans Une histoire vraie, de David Lynch), mais on reste bien accroché à l’histoire. Le découpage qu’a choisi Sean Penn ne m’a pas paru très utile, je crois que j’aurai préféré l’ordre chronologique, tout bêtement. Le jeune homme sera retrouvé mort en 1992, après une ultime farce de mère nature.

L’histoire mérite à elle seule d’aller voir ce film… ou de lire le bouquin !

Les invasions barbares

invasionsbarbares.jpg Hier soir sur France 2 était diffusé Les invasions barbares, un film québecois de Denys Arcand (2003). Je l’avais déjà vu il y a quelques mois, chez des amis qui avaient le DVD. Je l’ai revu avec un grand plaisir, et avec les mêmes émotions.

A Montréal, un homme, la cinquantaine, divorcé, professeur d’université entre à l’hôpital. Son ex-femme appelle son fils, qui n’a plus de liens avec son père depuis longtemps. Le fils fera tout pour adoucir les derniers jours de son père. Les amis et amantes de ce dernier vont venir les rejoindre, et ce sera l’occasion pour eux tous de parler de leurs vies, de la vie.

Malgré la difficulté du sujet, le film n’est jamais pesant. Les démêlés du fils avec le syndicat de l’hôpital, la police (il doit trouver de l’héroine pour épargner la douleur à son père) provoque des scènes très drôles. Et les dialogues percutants qui s’enchaînent laissent peu de place à la mélancolie.

Quel sens a-t-on donné à sa vie ? Ces intellectuels en discutent en toute franchise, d’un ton un peu désenchanté (l’âge aidant). Le sens de l’histoire, l’intelligence, la religion, le sexe, tout y passe. Les jugements sont souvent fulgurants et sans appel. L’amitié qui unit le groupe leur permet d’adoucir ces moments avec beaucoup d’humour et de recul. Malgré tout cela, l’émotion nous gagne à la fin.

Les invasions barbares a obtenu des nombreux prix (3 césars, 1 oscar, 2 palmes).

Un film remarquable.

Un singe en hiver

singe-en-hiver.png Grand moment de bonheur hier soir avec Un singe en hiver, de Henri Verneuil (1962). Dialogues de Michel Audiard (manifestement inspiré).

Première et seule rencontre Gabin – Belmondo, tous deux dans des rôles de prince de la cuite, ceux qui tutoient les anges… L’un en fin de carrière, quand pour l’autre elle s’avère prometteuse ! Ils se croiseront pour une cuite mémorable, se terminant sous un magnifique feu d’artifice.
Le personnage de Landru, le boutiquier, joué par Noël Roquevert, est aussi excellent, servi par des dialogues ubuesques.

Voilà un des dialogues, tirés de l’excellent site Audiard.net:

-Ah parce que tu mélanges tout ça, toi ! Mon espagnol, comme tu dis, et le père Bardasse. Les Grands Ducs et les boit-sans-soif.
-Les grands ducs…
-Oui monsieur, les princes de la cuite, les seigneurs, ceux avec qui tu buvais le coup dans le temps et qu’ont toujours fait verre à part. Dis-toi bien que tes clients et toi, ils vous laissent à vos putasseries, les seigneurs. Ils sont à cent mille verres de vous. Eux, ils tutoient les anges !
-Excuse-moi mais nous autres, on est encore capable de tenir le litre sans se prendre pour Dieu le Père.
-Mais c’est bien ce que je vous reproche. Vous avez le vin petit et la cuite mesquine. Dans le fond vous méritez pas de boire. Tu t’demandes pourquoi y picole l’espagnol ? C’est pour essayer d’oublier des pignoufs comme vous.

Une sorte d’hommage à la cuite ! En ces temps de diète, je me suis plus identifié à Gabin qu’à Belmondo… alors que la première fois que j’ai vu ce film…

The Snapper

the snapper Début du cycle Stephen Frears jeudi soir dernier sur Arte avec The Snapper (soit le lardon, ou le moutard en français). Une comédie tonique !

C’est l’histoire d’une famille de la classe ouvrière de Dublin: 6 enfants, des coups de gueule fréquents, des cuites au pub pour les plus grands…Bref, au début du film, on se demande dans quelle famille on est tombé: grossiers, peu éduqués, ils ne sont pas vraiment sympathiques.

Puis la fille aînée tombe enceinte (un soir de cuite), et refuse de dire qui est le géniteur. Après de fortes tensions (les rumeurs courent vite dans les pubs, tout finit par se savoir), la fille veut quitter le foyer familial. On va alors assister au rapprochement du père et de la fille: son père, plutôt rustre jusqu’ici, va s’ouvrir et montrer tout son amour et son humanité à sa fille. Il se met à lire des livres sur la grossesse, et se transforme littéralement en père idéal. La famille se ressoude… et le bébé naît: ce sera une fille.

L’acteur qui joue le rôle du père, Colm Meaney, est vraiment excellent.

C’est le début du cycle, Arte diffusera 5 films. The Snapper sera rediffusé dimanhe 15 à minuit. Et lundi prochain, ce sera Les liaisons dangereuses. A ne pas louper !

Les orgueilleux

lesorgueilleux.jpg Très bon film hier soir sur Arte: Les orgueilleux, de Yves Allégret (1954), avec Michèle Morgan et Gérard Philippe. Adapté du roman de Jean-Paul Sartre « Typhus » (Sartre a même participé à l’écriture du film).

Typhus se passe en Chine, mais pour les raisons d’une co-production Franco-Mexicaine, le lieu et la nature de l’épidémie ont changé…

Dans un bled paumé du Mexique, une femme (Michèle Morgan) va se retrouver bloquée par une épidémie (et veuve pour la même raison). Un Français (Gérard Philippe) vit dans ce village depuis 5 ans, ancien médecin devenu alcoolique à la suite de la mort de sa femme.
C’est Pâques, que les mexicains fêtent à grands renforts de pêtards et de musique, tout cela sous un soleil de plomb. Dans ce monde précaire, dur et sans pitié, ils vont se rapprocher peu à peu, et l’alcoolique redeviendra médecin grâce à l’amour de cette femme.

lesorgueilleux.png Il y a des scènes époustouflantes, des dialogues d’une justesse sans concession sur l’âme humaine… C’est très fort. Dans la scène de la tentative de viol par exemple, on frise la perfection.

Ce n’est pas l’affiche française en tête de l’article, et elle ne traduit pas du tout l’ambiance du film, mais elle est plutôt jolie, stylée. Ci-contre l’affiche française, beaucoup plus classique, situe mieux l’ambiance, encore que beaucoup plus romantique que n’est le film.

source : Arte