Timbuktu – Abderrahmane Sissako

Timbuktu - Abderrahmane Sissako Cela faisait longtemps que je voulais aller voir ce film. J’avais regardé les salles disponibles lors de sa sortie (en décembre), mais peu de salles le proposaient. Aujourd’hui, avec tous les césars obtenus (pas moins de sept !), c’est devenu beaucoup plus facile.

La première chose qui frappe dans ce film, c’est le rythme : c’est assez lent, mais c’est le rythme de l’Afrique saharienne, et il est parfaitement rendu. On  rentre tout doucement dans l’histoire, et on se laisse vite emporter, ne serait-ce que par la beauté des paysages.

Kidane, un touareg, vit avec sa femme et sa fille non loin de Tombouctou, sous une tente au milieu des dunes. La vie est calme, on boit le thé allongé sous la tente, ou l’on joue de la guitare dans la même position… Les dialogues entre Kidane et sa femme sont magnifiques, beaucoup de choses sont dites avec peu de mots et beaucoup d’amour.

À la ville, les djihadistes ont pris le pouvoir, et annoncent chaque jour de nouvelles interdictions : fumer, jouer au football, jouer de la musique… les femmes doivent porter des chaussettes et des gants (en plus du voile bien sûr), ce qui pose un problème à la marchande de poissons ! Lorsqu’une jeune fille a le malheur de plaire à l’un d’eux, elle sera mariée de force.

Pas de caricature grossière ici, on voit des hommes qui ne parlent pas la langue du pays, qui ne connaissent pas la culture locale, et qui n’ont qu’un mot à la bouche : interdiction ; tout cela au nom du djihad (eux-mêmes ne les respectant pas, fumant en cachette par exemple). Même le vieil imam de la mosquée de Tombouctou ne peut rien y faire, malgré toute sa sagesse et sa grande connaissance de la religion. Le djihad donne tous les droits.

On arrive donc tout de même à sourire, c’est aussi la force de ce film, au moins dans la première partie. Les habitants restent très calmes devant cette bande armée avec leurs interdictions ridicules, et se débrouillent pour les contourner quand c’est possible. Mais quand les procès tombent, et que la charia est appliquée sans grand discernement… Là, on ne rigole plus du tout. La scène de lapidation, même très brève, est un véritable choc.

Kidane se croit à l’abri au milieu des dunes. Mais un conflit avec un pêcheur qui a tué une de ses vaches (appelée GPS !) va l’amener devant le tribunal, et sa vie va basculer.

Abderrahmane Sissako réussit un très beau film, empreint de poésie et de douceur, sur un sujet pourtant difficile et violent.

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