Regain – Jean Giono

Regain - Jean Giono Troisième et dernier roman de la trilogie de Pan, après « Colline » puis « Un de Baumurges ».

L’occasion de retrouver une préface de la très chère Anne-Marie Marina-Mediavilla, que je me suis empressé de passer sans la lire, au cas où elle raconterait l’histoire comme dans Colline. Et comme là aussi, un petit dossier fait suite au roman, on peut se demander l’utilité de cette préface.

Bon, ceci dit, on apprend très vite qu’il s’agit d’un village de Haute-Provence qui perd ses derniers habitants, et vu le titre, on peut rapidement deviner ce qui va se passer.

Belle histoire que l’on a tout de même un peu de mal à croire, le retour à la terre de nos jours… même en 1930, date de parution du roman, le dépeuplement était déjà bien avancé.

Sur cette trilogie, ma préférence reste à Un de Baumugnes, tant pour l’histoire que pour le style.

Comme pour les deux romans précédents, la nature est présente et personnifiée, avec de puissantes évocations :

Les labours d’automne ont commencé ce matin. Dès le premier tranchant de l’araire, la terre s’est mise à fumer. C’était comme un feu que l’on découvrait là-dessous. Maintenant que voilà déjà six longs sillons alignés côte à côte, il y a au-dessus du champ une vapeur comme d’un brasier d’herbe. C’est monté dans le jour clair et ça s’est mis à luire dans le soleil comme une colonne de neige.

Le paysan qui laboure, c’est Panturle, une force de la nature (!), chasseur devenu laboureur pour les beaux yeux d’une femme :

Il est debout devant ses champs. Il a ses grands pantalons de velours brun, à côtes ; il semble vêtu avec un morceau de ses labours. Les bras le long du corps, il ne bouge pas. Il a gagné : c’est fini.
Il est solidement enfoncé dans la terre comme une colonne.

Assez bizarrement, on passera de l’automne au printemps, les rigueurs de l’hiver dans le village imaginaire d’Aubignane auraient sans doute découragé même le lecteur d’y croire seulement un peu.

Jean Giono (1865-1970) a un parcours qui force le respect. Dans les tranchées de la guerre 14-18, il fera partie des 11 survivants de sa compagnie ; puis il participera aux combats du chemin des Dames et à la bataille de la Somme ; en 1918, il est légèrement gazé.

En 1939, il est à nouveau mobilisé mais sera emprisonné pour ses écrits pacifistes (« Refus d’obéissance »). A la fin de la guerre, bien qu’il ait hébergé et cachés juifs et résistants, il est injustement accusé de collaboration et à nouveau emprisonné.

Élu membre de l’Académie Goncourt en 1954, il compte parmi les plus grands écrivains français du XXe siècle, mais resta néanmoins en marge des courants de la littérature de son temps. Humaniste, son œuvre est influencée par les auteurs de l’antiquité qu’il découvre très tôt : à cette époque, les livres des grands auteurs contemporains coûtaient 3, 50 F.

tandis qu’Aristophane, Eschyle, Sophocle, Théocrite, Homère, Virgile ne coûtaient que 0, 95 F. dans la collection Garnier. Voilà la raison qui a présidé à la confection de ma bibliothèque d’adolescent. Voilà les livres dont j’ai subi l’influence à l’époque où les impressions se gravent profondément dans les âmes sensibles.

Écrit-il dans son journal… La pauvreté à de bons côtés parfois. Son roman le plus connu est sans doute « Le Hussard sur le toit », porté à l’écran en 1995 par Jan-Paul Rappeneau.

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