Colline – Jean Giono

Colline - Jean Giono Premier livre de la « trilogie de Pan », c’est aussi le premier roman de Jean Giono, qui lui permettra d’arrêter son activité salariée et de vivre de son écriture. Heureux homme ! 😉

Première précaution à prendre : passer la préface (15 pages) d’Anne-Marie Marina-Mediavilla, qui dès les premières lignes nous fait gracieusement l’inventaire de ce qui nous est raconté sous le prétexte de l’extrême simplicité de l’intrigue. Elle préfère nous parler du dieu Pan, de la mythologie, et de la façon dont Giono l’a intégré au roman : c’est tellement plus intéressant, vous comprenez ?


À lire après le roman donc… celui-ci étant assez court (une centaine de pages), il est du reste suivi d’un dossier (25 pages) également réalisé par Anne -Marie, au cas où vous n’auriez pas encore compris comment pensent et parlent les paysans (oui, oui, ils parlent, mais pas comme nous…). Bon, j’exagère un peu, mais ces préfaces qui racontent l’histoire, ça me motive !

L’histoire donc, sans rien dévoiler : bien sûr, nous sommes en Provence, Giono y passera l’essentiel de sa vie, au point de se surnommer « le voyageur immobile ». Les Bastides Blanches, ce sont quatre maisons isolées sur une colline, où vivent autant de familles de paysans. La nature est forcément présente, et il va se passer des choses, somme toute normales. Là où cela devient intéressant , c’est comment ces faits naturels vont être interprétées par les-dit paysans.

La nature est personnifiée, et représente une force mystérieuse… La façon dont il décrit l’incendie comme une bête l’illustre bien :

Depuis elle a poussé sa tête rouge à travers les bois et les landes, son ventre de flammes suit ; sa queue, derrière elle, bat les braises et les cendres. Elle rampe, elle saute, elle avance. Un coup de griffe à droite, un à gauche ; ici elle éventre une chênaie ; là elle dévore d’un seul claquement de gueule vingt chênes blancs et trois pompoms de pins ; le dard de sa langue tâte le vent pour prendre la direction. On dirait qu’elle sait où elle va.

Si ces croyances anciennes peuvent sembler un peu décalées dans notre monde contemporain, elles ont le mérite de remettre l’homme à sa place : il fait partie intégrante de la nature, et ne peut y faire ce qu’il veut.

De plus, Giono sait y faire, et raconte l’histoire avec le vocabulaire des gens du coin. Je dois dire que je n’ai pas toujours trouvé le style très fluide, mais c’est un premier roman et il reste très agréable à lire.

Jean Giono (1865-1970) a un parcours qui force le respect. Dans les tranchées de la guerre 14-18, il fera partie des 11 survivants de sa compagnie ; puis il participera aux combats du chemin des Dames et à la bataille de la Somme ; en 1918, il est légèrement gazé.

En 1939, il est à nouveau mobilisé mais sera emprisonné pour ses écrits pacifistes (« Refus d’obéissance »). A la fin de la guerre, bien qu’il ait hébergé et cachés juifs et résistants, il est injustement accusé de collaboration et à nouveau emprisonné.

Élu membre de l’Académie Goncourt en 1954, il compte parmi les plus grands écrivains français du XXe siècle, mais resta néanmoins en marge des courants de la littérature de son temps. Humaniste, son œuvre est influencée par les auteurs de l’antiquité qu’il découvre très tôt : à cette époque, les livres des grands auteurs contemporains coûtaient 3, 50 F.

tandis qu’Aristophane, Eschyle, Sophocle, Théocrite, Homère, Virgile ne coûtaient que 0, 95 F. dans la collection Garnier. Voilà la raison qui a présidé à la confection de ma bibliothèque d’adolescent. Voilà les livres dont j’ai subi l’influence à l’époque où les impressions se gravent profondément dans les âmes sensibles.

Écrit-il dans son journal… La pauvreté à de bons côtés parfois. Son roman le plus connu est sans doute « Le Hussard sur le toit », porté à l’écran en 1995 par Jan-Paul Rappeneau.

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