Train de nuit pour Lisbonne – Pascal Mercier

Train de nuit pour Lisbonne - Pascal Mercier Un autre livre proposé par le libraire de Morlaix (« bien écrit, profond »), et qui commence tellement bien que je l’ai offert à des amis chez qui je passais le week-end. Mais finalement j’ai trouvé qu’il ne tenait pas ses promesses, et je l’ai terminé un peu laborieusement.

Ça commence pourtant bien avec Gregorius, 57 ans, professeur de langues anciennes à Berne, surnommé « le papyrus » par ses élèves, et à la vie réglée de façon immuable. Une rencontre furtive va pourtant faire basculer sa vie, et le faire partir pour Lisbonne à la recherche d’un écrivain dont le livre lui est tombé dans les mains et bouleversé par la même occasion.

Le livre en question, nous allons en avoir de très larges extraits tout au long du bouquin. L’auteur, Amadeu de Prado, a tout pour être heureux, mais ne l’est pas : excès d’intelligence et de lucidité sur le monde et les humains ? bref, il va nous livrer ses questionnements sur la vie, et c’est ce qui fascine Gregorius, qui y voit des similarités avec la sienne. En ce qui me concerne, c’est ce qui va vite me lasser, à tel point que j’appréhendais les-dits extraits, reconnaissables aux caractères en italiques. D’autant qu’ils peuvent faire plusieurs pages !

Ces réflexions philosophiques, j’ai trouvé que ça tournait pas mal en rond. On peut certes s’interroger à l’infini sur la vie ! L’auteur (Pascal Mercier, pas Amadeu) aurait pu ne garder les meilleures, et soigner le personnage de Gregorius, car de son côté, il m’a semblé que beaucoup de choses restaient sans réponse.

Car les réflexions d’Amadeu ne manquent pas d’intérêt, c’est plutôt leur nombre qui est vite lassant :

Est-il vrai que tous nos actes sont en grande partie déterminés par la peur de la solitude ? Est-ce pour cela que nous renonçons à toutes les choses que nous regretterons à la fin de notre vie ? Est-ce pour cette raison que nous disons si rarement ce que nous pensons ? Pourquoi, sinon, tenons-nous à tous ces mariages désunis, à ces amitiés mensongères, à ces ennuyeux repas d’anniversaires ? Qu’est-ce qui nous arriverait si nous renoncions à tout cela, si nous mettions fin à ce chantage insidieux et décidions de nous assumer ? Si nous laissions jaillir comme une fontaine tous nos désirs réduits en esclavage et la fureur que nous cause notre servitude ? Car cette solitude redoutée, en quoi consiste-t-elle réellement ? Dans le silence des reproches qui nous sont désormais épargnés ? Dans la nécessité abolie de marcher à pas feutrés, en retenant notre souffle, sur le champ de mines des mensonges conjugaux et des demi-vérités amicales ? Déplorons-nous la liberté de ne nous asseoir, à table, en face de personne ? L’abondance de temps qui s’ouvre quand se tait le feu roulant des rendez-vous ? Ne voilà-t-il pas des choses merveilleuses ? Un état paradisiaque ? Pourquoi alors en avoir peur ? Est-ce à la fin une peur qui n’existe que parce que nous n’avons pas réfléchi à son objet ? Une peur qui nous a été inculquée par des parents, des professeurs et des prêtres à la tête vide ? Et pourquoi sommes-nous en réalité tellement sûrs que les autres ne nous envieraient pas, s’ils voyaient à quel point notre liberté est devenue vaste ? Et qu’ils ne rechercheraient pas aussitôt notre société ?

Beaucoup (de points) d’interrogations comme vous pouvez le constater… 😉

Le sujet du livre, finalement, c’est la possibilité que l’on a tous de pouvoir sortir de notre quotidien pour réellement vivre notre vie. Mais Gregorius quittera Lisbonne et reviendra à Berne, et l’histoire ne dit pas ce qu’il fera de sa nouvelle liberté. Après les longs questionnements d’Amadeu, il n’y a plus de place pour que Gregorius vive sa vie, cinq cents pages sont déjà atteintes.

Pascal Mercier, de son vrai nom Peter Bieri, est né en 1944 à Berne, est un philosophe et écrivain suisse, et titulaire de la chaire de philosophie des langues de Berlin de 1993 à 2007.

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